The Project Gutenberg EBook of Vocabulaire,  Poèmes, by Jean Cocteau

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Title: Vocabulaire,  Poèmes

Author: Jean Cocteau

Release Date: September 26, 2019 [EBook #60366]

Language: French

Character set encoding: UTF-8

*** START OF THIS PROJECT GUTENBERG EBOOK VOCABULAIRE,  POÈMES ***




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JEAN COCTEAU

VOCABULAIRE

POÈMES

PARIS

ÉDITIONS DE LA SIRÈNE

39, Boulevard Malesherbes

1922

TABLE DES MATIÈRES

HOTEL DE FRANCE ET DE LA POÉSIE
STOP
SONNET DE LA BAIGNEUSE
LA MORT DE L'AMIRAL
MIROIR DES SPORTS
PIÈCE DE CIRCONSTANCE
UN BONJOUR D'ARCACHON
TRILLES
OBJET DIFFICILE À RAMASSER
MYOSOTIS
SOUVENIR DE NAPLES
CIEL D'AVRIL
ÉCUME DE MER PAIN ENCHANTÉ
LA BELLE BLEUE
EN VOILÀ UNE SURPRISE
PLACE D'OMBRE
LES AMANTS DE VENISE
AURORE
AMOUR
MISS AÉROGYNE, FEMME VOLANTE
BAIGNEUSE
MARINE
MORT D'UN CYGNE
IDOLE
CHEVEUX D'ANGES
COUTUMES DU NORD

LE MIRLITON D'IRÈNE
ROSIER
FRUIT
CHAT
VÉSUVE
TROUVILLE
PRISE SUR LE FAIT
ACCORDÉON
MINUIT
LES CHEVEUX GRIS, QUAND JEUNESSE LES PORTE...
DOS D'ANGE
LES CHIENS ABOIENT DE PRÈS...
LE PARISIEN
LE POÈTE DE TRENTE ANS
NOCTURNE
LES YEUX DOUX
DIEU VOIT DERRIÈRE SA NUIT...
L'INCENDIE
DE CHANTER AMOUR QUI NOUS MORD...
À FORCE DE PLAISIRS...

TOMBEAUX
DE SAPHO
DE SOCRATE
DE NARCISSE
D'UN FLEUVE
DE DON JUAN
DU CHIEN D'ALCIBIADE
LES MESAVENTURES D'UN ROSIER
ALERTE
LA PEUR DONNANT DES AILES AU COURAGE
ANGÉLUS
PANOPLIE
MIRACLES
GABRIEL AU VILLAGE
CANNE DE JONC
LES OISEAUX SONT EN NEIGE
EMBOUCHURE DES PENSÉES DIVINES
ROSIER SAUVAGE
CONTREBANDE
LA CABANE ABANDONNÉE
PRIMEURS CRUELLES
COSTUME DE SPORT
CHANGEMENTS À VUE
CALENDRIER MÉCANIQUE
LES ANGES MALADROITS...
ARCHE
MOUCHES, DISTRACTIONS
SONNET
GRECO
L'ENDROIT ET L'ENVERS
M'ENTENDEZ-VOUS AINSI?


À

Francis Poulenc
Darius Milhaud
Arthur Honegger
Louis Durey
Georges Auric
Germaine Tailleferre


HOTEL DE FRANCE ET DE LA POÉSIE

Arbre, bocal d'oiseaux, feu de bengale
entre les îles!
Le soleil fait chanter les tramways dans la ville.
Le ciel est un marin assis sur les maisons.

En soi même noyé Narcisse,
N'aime pas les glaces d'hiver.
Les anglais écrivent des vers
Comme il leur pousse du gazon;
Souvent nagent mieux que narcisses
Entre deux eaux, entre deux draps;
Et le cygne qui dort le menton sur son bras
Plus blanc que la neige de Suisse.

Flamme, petit poisson ronge du lampion.
Orchestre par dessous, le vent venu des îles,
Met le feu, aussitôt de terribles lions
Sortent, qui se cachaient dans le bocal fragile.
L'arbre et l'aérostat se dépassent chacun;
Alors le carnaval des pompiers fend la foule.
Parfois une maison, une rose s'écroulent,
En soulevant une colonne de parfum.

Mon cœur tourne à l'envers du vôtre, c'est la vie.
Ce manège fait mal au cœur. Oh! que j'ai mal.

L'âme de votre fils va vous être ravie
Jeune mère, si Tong l'enferme dans la malle.

Le fils que l'éventail fait revoir à sa mère
Et que l'aide chinois ramène à son fauteuil
Ne parle plus jamais... Il périra en mer.

Dans le théâtre, un arbre avec toutes ses feuilles;
L'arbre dormait debout, couronné d'émeraude.

Lâchez tout!
Gambetta part en ballon captif.

Montgolfière d'amour, monte dans la nuit chaude
Les étoiles, chacune indique les récifs.

Vieux ascenseurs fanés dont se penche la tige,
D'être ailleurs étendu, toute l'âme à l'envers,
Le décapité voit un drôle d'univers;
Son corps, en un clin d'œil, succombe à ce vertige.

Irai-je en un miroir où nous recommençons,
Engloutir le poitrail fabuleux du quadrige
De cuirassiers mourant parmi les écussons.

Il est des jours, la mer, pour enjôler le mousse,
Lui découvre ses lits, agite ses dessous,
Débouche bruyamment un champagne qui mousse,
Mauvais livre de poche acheté quatre sous.
(Ses yeux, demain, feront sourire l'équipage)

Ballon! bocal d'oiseaux légers pris au filet.

Le manège à vapeur enroule son voyage;
On ne monte plus: C'EST COMPLET.

Voici qu'on dépose l'actrice
Et son ventriloque inhumain;
Pour cacher quelque cicatrice
Elle effeuille ses vieilles mains.
Une anglaise qui l'avait prise
Pour Venise, part pour Venise;
Elle se suicide en chemin.

Adieu, bocal, vélocipèdes!
Fantômes de visage en feu;
La nuit n'a pas assez d'éloges
Pour le palais du mal de mer;
Ses opéras d'or et ses loges
Roulent sur les vagues de l'air.

Au milieu chante la sirène
À cheval. Son visage vert
Est transparent comme le verre,
Sa robe en velours rouge traîne
Dans les moulures de la mer.

Parfois on la voit à l'envers
Si elle plonge les mains jointes,
Car les sirènes sont des saintes.

D'autres sirènes ont des ailes
Et des becs de chauve-souris;
D'autres nagent sous des ombrelles
Et on meurt si elles sourient.

Perle! perles, je vous rapporte
Du fond des miroirs machinés;

Jeunesse, épave des mers mortes,
Miroirs déformants de l'amour
Où chacun cherche à se puiser;

Une femme, une aérogyne,
En nous envoyant des baisers
Faisait de gracieux mensonges;

Elle a découvert la machine
Qui permet de voler en songe;

C'était simple comme bonjour.

STOP

Beaux clowns vous êtes fox-terriers.
Le sucre et les maisons de plâtre,
Sans la chaleur de nos théâtres
Seraient le tombeau des guerriers.

Si la palme qui nous apporte
Le plus doux mal de la mer
N'est pas un geste de morte,
Vienne l'antique steamer.

Le soleil du ciel d'Europe,
Dorant les galons du chef,
Fait grandir le télescope,
Ô boussole: fleur des nefs.

Moi je reste au bord de la vague,
Laissant des mousses de savon
Sale, et toute une barbe d'algues
Sur le sable où nous écrivons.

Chaque matin, mon capitaine,
Vous jetez des bouteilles d'encre
Pour votre compagne lointaine.
Vous feriez mieux de jeter l'ancre.

SONNET DE LA BAIGNEUSE

Ce torse debout n'ose encore
Être, nu, ce dont il a l'air,
À savoir le haut d'un centaure
Dont la croupe serait la mer.

D'une rose où cesse la chair
Que quelque frisuree décore,
Commence le pelage vert;
Mais un même sang les colore.

Pauvre fille des semi-dieux
Combien vous aimeriez mieux
Pour une baigneuse être prise,

Par trop, feignant d'avoir quitté
Notre terre et votre chemise.
Infidèle à l'antiquité.

LA MORT DE L'AMIRAL

Les savons,
les neiges,
la rage,
le rire du cheval sauvage,
sortant nu de chez le barbier.

Nos mains, capucines de l'âtre,
et le couteau de la colombe
et la momie en son herbier

et l'amiral debout: il sombre
comme un rideau de théâtre,
applaudi par tout le rivage.

MIROIR DES SPORTS

Grands yeux, l'orage vous fait voler bas.
Sous le piston d'amour Bastien caracole.
Paris, joli voyou qui se frotte le bras,
Mélancoliquement après la Haute-École.

Coureurs, nageurs, orgueil des berges de Paris,
Parfois votre faiblesse est votre pire audace!
À cheval sur un cœur, cycliste, tu souris,
Dans les pneus enroulés comme le cor de chasse.

Grands yeux, l'orage vous fait voler bas.
Le drapeau du lavoir était de la partie.
Vénus! chatouille un peu, sans chemise et sans bas,
Le cycliste rêvant, la main sur ses parties.

PIÈCE DE CIRCONSTANCE

Gravez votre nom dans un arbre
Qui poussera jusqu'au nadir.
Un arbre vaut mieux que le marbre,
Car on y voit les noms grandir.

UN BONJOUR D'ARCACHON

Une cage de poissons rouges
Tombe des cieux infidèles.
Votre tonnerre déjà bouge
Dans l'écurie des hirondelles.

La gondole est une autre seiche,
Parfois veuve instantanément,
Lorsque l'attaque avec sa bêche
Quelque féroce garnement.

Dans un élégant sarcophage
Voyez descendre, au fil de l'eau,
(Ce jeu convient-il à votre âge)
La belle rameuse en maillot.

Tous plaisirs ce temps les empêche;
Mais, si nous ne l'effarouchons,
Elle apportera de la pêche:
Un cœur, souvenir d'Arcachon.

TRILLES

Plis de l'eau, les giroflées
Ou pantoufles de demoiselles.

Ils en eurent les mains enflées
De trop courir après elles.

Le varech, tabac d'Angleterre,
Entre l'Océan et la terre
Charme les canotiers bien mis.

Une petite vague fume
Sa première pipe d'écume;

Nous sommes ses meilleurs amis.

OBJET DIFFICILE À RAMASSER

Les chats enrubannés, les casquettes de chasse,
Les coquelicots et les confettis;
Que voulez-vous que la modiste fasse
Avec le Tour de France, trop petit.

Comme la plume au vent, les mains d'après nature
Blessent ton cœur, bel inconnu.
Qu'il prenne garde à la peinture;
Car le zèbre est Arlequin tout nu.

MYOSOTIS

Pipe au coeur de cendre si tendre
Qu'il plonge en ton champagne amer
Mer matinale aux pieds d'éponge,
Un souvenir de Saint-Omer.

Un matelot coupe une orange:
C'est la mer rouge. Le rideau
Fait l'autre matelot un ange
Ayant ses voiles dans le dos.

Qu'il entre, Marie, et qu'il parte
Jouer ailleurs son seul atout:
Il a mis du bleu sur les cartes,
Et son col de l'ancre partout.

SOUVENIR DE NAPLES

Le Paradis, tombant, s'était cassé dans l'ombre.
Les coups de pistolet, d'où naissent les colombes,
Faisaient mille marins s'envoler des vaisseaux,
Pour chercher, à tâtons, ses chiffres, ses morceaux.

On accrochait partout des balcons, des échelles;
Les femmes, n'ayant rien à se mettre sur elles,
Appelaient au secours de leur lit aux pieds d'or;
Les matelots entraient et changeaient le décor.

Une morte, riant dans son cercueil de verre,
Conduisait les chevaux de son char, ventre à terre;
(Ce char appartenait au marchand de coco.)
C'était Herculanum, Pompéï, Jéricho.

Jamais je n'ai rien vu de plus fou sur la terre.

CIEL D'AVRIL

Bengalis babillards
fleur de vélo l'ombre des cages
la vague est une cloche à melons
sous laquelle
ondine, te besogne un bras rameur nu rose

Charme les pneus si tu l'oses!
Saut du lit
billard du printemps.

ÉCUME DE MER PAIN ENCHANTÉ

Le gant rouge du crime* Le cortège du serpent* Sa tête qui est un revolver* La gangrène* Le jeune marin qui colle un timbre* As de trèfle* Oh! mon Dieu! que fait-il de son pouce? il se condamne à mort* Vénus, toute rose, assise dans mille calèches démolies contre la muraille* La menthe, le bluet, le tambour, la grenadine* Et le pain enchanté qui s'envole par dessus le toit.

LA BELLE BLEUE

L'ouverture du ciel faisait Ah! en feu d'artifice cœur parachute bleu bouche ouverte on lui voit le ciel étoilé jusqu'au fond de la gorge et s'il fait Ah! et Oh! tout Dieu tombe avec lenteur comme un rideau d'Opéra.

EN VOILÀ UNE SURPRISE

N'ayez pas peur, explorateur! L'explosion de salpêtre babil, c'étaient cent mille canaris dans la grotte en miroirs à devenir sourd. Le chasse mouches, petit balais, petit chasse bouche malais, qui rafraîchit tout le palais, comme une menthe mon palais.

PLACE D'OMBRE

Quand le tonnerre cessa, il roucoulait. Dieu descendit, et dans le crêpe espagnol apparut la rose tuée. C'était le cœur du toréador, planté sur la corne du porte-manteau.

LES AMANTS DE VENISE

Fête galante

Un Londrès retrouve la bague
Sous les arbres. Pianos d'ombre.

Si se détache votre cendre
Mon avenir se divulgue.

Ô Musset! Ô Georges Sand!
Ô Venise! vieille guitare
Pleine de musique et d'eau,

Un simple tremblement de terre
Brouillera tes dominos.

AURORE

Par file à droite!

Le feu du cabinet particulier était un buisson d'écrevisses.

Chaque cavalier attribue secrètement à une dame le nom d'Ida. Le prince dé Monaco accroche des insignes de Touring-Club, des cravates blanches, des fausses moustaches. La rose, messieurs, dit-il, est le pétard du matin! C'est aussi la roulette à dormir debout sur la mer.

Les touristes se relayent. Ils échangent leurs alpenstocks contre des vélocipèdes. Le coq chante. Et chacun rentre chez soi.

AMOUR

Le cœur, une éponge avalée,
Effacera la craie du coq.
La crête en ardoise salée,
L'océan y casse des bocks.

MISS AÉROGYNE, FEMME VOLANTE

Pigeon vole! Aérogyne.
Elle ment avec son corps
Mieux que l'esprit n'imagine
Les mensonges du décor.

Aérogyne, pigeon vole!
Rêve, allège le dormeur lourd;
Eloa, dompteuse d'Eole,
Dans un océan de velours.

BAIGNEUSE

Bon nègre, ce qui vous effarouche,
C'est de croire madame nue en plein air;
Or c'est son éventail en plumes d'autruches
Que vous prenez pour l'écume de mer.

L'océan n'est pas un troupeau d'autruches.
Bien qu'il mange des cailloux, des algues;
Ce serait facile de devenir riches
En arrachant toutes les plumes des vagues.

Ses initiales sont sur l'éventail;
Il ne s'agit pas de sable par terre.
Ne voyez-vous pas d'où s'élance sa taille?
C'est le bal de l'ambassade d'Angleterre.

MARINE

Bouteilles vous cassez sur la mer vos tessons.
Le mur, méchante mer en tessons de bouteilles.
À la pipe réclame un nuage s'essaye.
Et, du reste, la mer est le ciel des poissons.

MORT D'UN CYGNE

Aux yeux ouverts la
dentelle en marche

Rameurs vous empoignez la morte,
Debout dans ses plis orageux.
Des oiseaux migrateurs l'escorte
Où jamais aucun ne dit: Je.

Tors-toi le cou, noble statue
De sel, vite retourne-toi;
Car la jeunesse qui nous tue
Se sauve ensuite par le toit.

Jeunesse ne montre sa tête,
Mais à ce couteau dans mon sein,
Ce couteau d'un tir de la fête,
On devine un jeune assassin.

Du ciel la perle est maladie.
Oh! venez, plongeurs ou rameurs.
À ma touchante mélodie,
N'entendez-vous pas que je meurs?

Un nœud embaumé se dénoue,
Lâche ses pourpres et son miel,
Car un ange qui fait la roue
Est frappé par le feu du ciel.

Nuage en croix êtes-vous Gilles,
Écartant ses bras de satin,
Ou Gilles de Retz, plus agile
À rougir le ciel du matin?

Les hauts nuages sont Europe
Qui vogue, ils sont aussi cheval.
Souvent le naïf télescope
Y découvre un combat naval.

Ouvre ton éventail de plumes
Onde cruelle à qui je plus
Déjà je fonds, je suis écume...
Bientôt je ne chanterai plus.

IDOLE

Toutes ses vieilles cicatrices
Terre
font le charme
de ta figure de guerrier

CHEVEUX D'ANGES

Aïe! Les anges s'accrochent les cheveux dans l'arbre de Noël. Leurs jupes flambent comme du papier de soie. Aussi ont-ils peur des bougies, des bûches. Quelquefois la fiancée de l'aviateur lui ôte un cheveu d'ange. Il existe même une figure de cotillon appelée: CHEVEUX D'ANGES. Les cavaliers s'asseyent; les dames crient à tour de rôle: Cheveux d'ange! Cheveux d'ange! Aussitôt les cavaliers se lèvent et s'envolent.

Les anges sont soldats, boxeurs nègres, matelots, championnes de tennis. Après leur mort on les enterre sous l'Arc de Triomphe.

TOUS LES QUINZE JOURS JE CHANGE DE SPECTACLE

COUTUMES DU NORD

Prisonnier de quelque banquise,
Passe, debout, l'amiral mort.

Cygne dont la voix est exquise,
Meurs en scène comme un ténor.

L'amiral, par la force acquise,
Se promène en la mer du Nord
Depuis cent ans, chamarré d'or.

Ici, Carolines, Marquises,
Sont vitrines de costumier.
L'amiral tient sa longue-vue;
Ainsi, Napoléon premier
Passait ses grognards en revue.

Mais ici grognards sont les ours,
Buvant du lait, faisant l'amour.

Sa veuve est morte sans nouvelles
Et l'amiral se meurt d'ennui,
N'ayant aucune lettre d'elle
À lire au soleil de minuit.

La nuit, quelquefois, les étoiles
Ont faim. On allume du bois
Sur la neige. Les chiens aboient.
On fait aussi feux de bengale,
Feux de la Saint-Jean, feux de joie,
Pour sauver le traîneau à voiles.

Le matin, les gens étonnés
Ont des binocles, des faux nez,
Ignorant tout du Carnaval,
Des règles du combat naval
Qui dure toute la journée.

Des danseurs, chaussés de patins
Et portant des manchons d'hermine
Valsent sur la glace sans tain,
Y écrivent le nom d'Hermine
Qu'un joli paraphe termine.

Simple programme de matin.

Le soir, les loups du ciel s'allument,
Le traîneau stoppe de nouveau
Devant le passage-à-niveau.

Ce sont là, du Nord, les coutumes.

LE MIRLITON D'IRÈNE

ROSIER

Afin que leur fantaisie
Ne soit pas que du carton,
Rosier de la poésie,
Grimpe autour des mirlitons.

FRUIT

Un lampion du dimanche,
S'il est mûri par le vent,
Peut mettre le feu aux branches;
Il faut le cueillir avant.

CHAT

Le feu: jolis poissons rouges,
Endormait le chat fermé.
Si, par mégarde, je bouge,
Le chat peut se transformer.

Il ne faut jamais que cesse
Le rouet des vieilles tours;
Car se changer en princesse
Est le moindre de ses tours.

VÉSUVE

Naples, ses tarentelles
Montrent son joli pied;
Mais la belle en dentelles
Fume comme un troupier.

TROUVILLE

L'océan, comme émeraude.
A certes quelques défauts;
Mais la baigneuse nigaude
Aime mieux les bijoux faux.

PRISE SUR LE FAIT

Jeu de cartes
ou éventail?

Elle triche.

ACCORDÉON

Accordéon, cheval de fiacre,
Le dernier soupir arraché,
Tu meurs, en riant de la nacre,
Sur les genoux de ton cocher.

MINUIT

L'enfant dort.
À Noël il fait semblant.
(Jeune mère cela vous met à l'aise.)
À côté veille, assis sur la chaise,
Son ange gardien, ramoneur blanc.

LES CHEVEUX GRIS, QUAND JEUNESSE LES PORTE...

Les cheveux gris, quand jeunesse les porte,
Font doux les yeux et le teint éclatant;
Je trouve un plaisir de la même sorte
À vous voir, beaux oliviers du printemps.

La mer de sa fraîche et lente salive
Imprégna le sol du rivage grec,
Pour que votre fruit ambigu, l'olive,
Contienne Vénus et Cybèle avec.

Tout de votre adolescence chenue
Me plaît, moi qui suis le soleil d'hiver,
Et qui, comme vous, sur la rose nue,
Penche un jeune front de cendres couvert.

DOS D'ANGE

Une fausse rue en rêve
Et ce piston irréel
Sont mensonges que soulève
Un ange venu du ciel.

Que ce soit songe ou pas songe,
En le voyant par dessus
On découvre le mensonge,
Car les anges sont bossus.

Du moins bossue est leur ombre
Contre le mur de ma chambre.

LES CHIENS ABOIENT DE PRÈS...

Les chiens aboient de près et de loin le coq chante.
C'est votre façon d'être, ô campagne méchante.
Mais Avril change tout le lendemain matin,
Fait aux arbres fruitiers mâtures de satin,
Sur vigne et papillon frotte le même soufre,
Augmente le soleil sans que la terre en souffre,
Dans le vin de la rose enivre les bourdons,
Et d'amour dénoué réunit les cordons.

Ainsi chante un poète aimé des dieux farouches,
Et qui, comme Janus, possède plusieurs bouches.

LE PARISIEN

Ton ingénuité met un genou en terre,
Brebis de toison d'or, lainage d'Angleterre!

Ile faite en ardoise, en pelouse et en fleurs,
Depuis toujours la Manche efface votre craie.

Pour endormir un coq de toutes les couleurs,
Il suffit de tracer lentement une raie
À la craie. Aussitôt, sans forces, laisse choir
Le coq son bec orné de rouges testicules.

Souvent coqs de combat craignent le ridicule,
Mais un coq endormi reste sur son perchoir.

Londres! que de maisons faciles à confondre.
Londres mieux que la craie ou le pavot endort;
Elle a ses chapeliers et ses poètes morts.
Je n'étais pas heureux à Londres.

Je ne me sentis à mon aise qu'au retour,
En revoyant Paris fait comme un tour de cartes,
Les boulevards, la Seine petite et la Tour
Eiffel qui les jambes écarte.

LE POÈTE DE TRENTE ANS

Me voici maintenant au milieu de mon âge,
Je me tiens à cheval sur ma belle maison;
Des deux côtés je vois le même paysage,
Mais il n'est pas vêtu de la même saison.

Ici la terre rouge est de vigne encornée
Comme un jeune chevreuil. Le linge suspendu,
De rires, de signaux, accueille la journée.
Là se montre l'hiver et l'honneur qui m'est dû.

Je veux bien, tu me dis encore que tu m'aimes,
Vénus. Si je n'avais pourtant parlé de toi,
Si ma maison n'était faite avec mes poèmes,
Je sentirais le vide et tomberais du toit.

NOCTURNE

Rose en hiver ailleurs partie
Dites où vous avez été.
L'Europe aux couleurs assorties
Change la place des étés.

La rose, dont souvent je parle,
Orne avec l'ancre et le pompon,
Vénus faite comme une perle
Et pliant toujours ses jupons.

Ce compromis de chair, d'écume,
Forme les plus étranges nœuds
Entre les poissons épineux
Et, Vénus, vos ramiers de plume.

Dans le bocage de mes os,
Dans l'arbre bleu de mes artères,
Mêlez-vous, fleurs, poissons, oiseaux,
Si mal réunis sur la terre.

LES YEUX DOUX

Tristesse, engrais de mes bonheurs. Il nous termine,
Ce grillage, partout sorti des encriers.
Napoléon, apiculteur aux gants d'hermine
Le jour du sacre, avec un bonnet de lauriers
Et des pantoufles de nacre.

Cygne mourant, si doux à entendre crier,
Fais le sang noir en quoi sont écrites ces lignes.

DIEU VOIT DERRIÈRE SA NUIT...

Dieu voit derrière sa nuit de pommiers debout.
Dépêchons-nous, faisons le gros dos et fuyons;
C'est la neige du Sphinx, la tourmente de sable;
C'est le mica d'asphalte et la grêle d'amour.

Quelque chose de Dieu serait-il périssable
Qu'il redoute la jungle où boivent les lions?

La nuit d'Avril est votre prie-Dieu, Sainte-Vierge!
On en ferait le tour sans recevoir de boue.

Pour combien, pour combien, Vierge, de millions
De diamants volés et de larmes de mères
Dans ta corbeille ronde où tout tient à l'envers.

Ces lions, ce sont les lionnes de la mer,
S'aplatissant, sautant, léchant les espadrilles.

Voyez-vous s'approcher un marin porte-cierge,
Les femmes du village et quatre bataillons?
Ils jouaient la trompette et dansaient le quadrille
Et semaient leurs enfants mâles dans tes sillons.

Aussi repousse-t-il des navires, des voiles,
Et toujours au zénith de nouvelles étoiles.

L'INCENDIE

Joyeux épouvantail! Quel drame. Les cerises
(Celles du haut surtout) en perdent la raison.
Quoi, la pure Aglaé d'un pompier s'est éprise
Et cet amour est su de toute la maison.

Pour ses larmes, maison, pardonne lui sa faute;
Car elles ont fait fuir le diable du quartier.
Tout bas elle pleurait. Grâce à l'amour, sa haute
Et puissante douleur délivre le fruitier.

DE CHANTER AMOUR QUI NOUS MORD...

De chanter amour qui nous mord
Le cœur, je ne sens nulle envie,
Il occupe toute ma vie.
Non. J'aime mieux chanter la mort.

Comme eut grande soif de lui-même,
Narcisse, penché sur une eau
Où se voyait de bas en haut,
Donnant, recevant le baptême,

Je pense à cet amour complet
Que sera ma mort, à cet ange
Qui, d'un coup d'avirons, mélange
L'original et le reflet.

Afin que le tour réussisse
Il ne faut pas trace de sang,
Et Narcisse disparaissant
Ôte le reflet de Narcisse.

Car si l'ange manque le tour,
Hélas! ce qui souvent arrive,
Narcisse n'est plus sur la rive,
Son reflet reste et meurt d'amour.

Certain silence nous dénonce
Plus que des cris. Niaise Echo
Que cherchez-vous le long de l'eau
Courante, nymphe au cœur de bronze?

Ce parfum de petite fleur
Blanche, vous fait rougir de honte;
Si vous croyez ce qu'on raconte
Vous jouez deux fois de malheur.

Vous ne savez pas vous y prendre,
Echo! Patientez un peu:
L'eau fraîche n'éteint pas le feu
Dont Narcisse est la salamandre.

Vous mentez selon le décor,
Soit dit sans vous faire un reproche;
Ne cassez pas contre une roche
Votre voix. Elle vaut de l'or.

Répétez tout! c'est de votre âge.
Narcisse, invisible à nos yeux,
Désirait se connaître mieux:
Il habite enfin son image.

À FORCE DE PLAISIRS...

À force de plaisirs notre bonheur s'abîme.
Que faites-vous de mal, abeilles de ma vie?
Votre ruche déserte étant maison de crime,
Je n'ai plus, d'être heureux, ni l'espoir, ni l'envie.

Sous un tigre royal, la rose aux chairs crispées,
Meurt de peur; il est vrai que ce tigre a des ailes.
Mais l'ange gardien qui casse nos poupées,
A des ailes aussi comme une demoiselle.

Les anges, quelquefois, tachés d'encre et de neige,
Car ils font leur journal à la polycopie,
Leurs ailes sur le dos, s'échappent du collège,
Volant un peu partout, plus voleurs que des pies.

La neige est vite marbre aux mains prédestinées;
Du marbre au sel Vénus connaît la route blanche,
Et du sel à la chair enfin la voilà née
Sur la plage où chacun se baigne le Dimanche.

Mais, sachant les détours de la chair aux statues,
Vénus s'endort debout et se réveille au Louvre.
Elle ne risque rien. Chaque fois qu'elle tue,
C'est seulement mille ans après qu'on la découvre.

Endormez-vous au bruit de la machine à coudre
Enfance, cœur cruel amoureux des supplices.
Voici la guêpe morte et l'odeur de la poudre
Et les soleils cloués pour vos feux d'artifice.

Christ, larrons, cloués haut en face du village.
La veille, les soldats jouaient de la musique;
On attendait le soir, on redoutait l'orage,
Et leur mort écrivait: VIVE LA RÉPUBLIQUE.

D'un seul soupir d'amour vit et meurt la fusée.
Elle ouvre ses yeux bleus: ainsi chante le cygne.
Mais voyant de sa mort une foule amusée
Les referme, rend l'âme et tombe dans les vignes.

Souvenirs de campagne, ah! laissez-moi tranquille;
De la rose du soir ne soyez pas le chancre.
J'ai le vertige en haut des maisons de ma ville,
Mon ombre se répand de moi comme de l'encre.

Voici le miel que font mes abeilles, c'est l'ombre
Qui me vide. Je suis plus léger que le liège
Plus léger que l'écume, et cependant je sombre,
Entraîné par Vénus et par l'homme de neige.

TOMBEAUX

DE SAPHO

Voici, toute en cendres, Sapho,
Dont ce fut le moindre défaut
D'aimer, Vénus, les coquillages
Que vous entr'ouvrez sur les plages.

Le feu qu'elle éteint dans la mer
N'était pas la flamme des cierges;
Comme fleurs rougissent les vierges,
Sapho rougit comme le fer.

Ce feu dont ne reste que poudre,
Tua jadis une cité.
Mais soyons justes, car la foudre
Y tomba d'un autre côté.

Non. Sapho vous apprit à lire,
Vierges, dans son propre roman;
Elle repose maintenant
Entre les jambes de sa lyre.

Sur ce beau corps mélodieux
Elle repose chez les dieux:
Sapho, déesse médiane
Entre Cupidon et Diane.

DE SOCRATE

Ce qui distingue cette tombe
Des autres, soit dit en passant,
C'est que n'y viennent les colombes,
Mais, parfois, deux agneaux paissant.

Visiteuse, que ne vous vexe
Ce sage victime des sots:
C'est la grâce de votre sexe
Qu'il aimait chez les jouvenceaux.

DE NARCISSE

Celui qui dans cette eau séjourne
Démasqué, vécut s'intriguant.
La mort, pour rire, le retourne
À l'envers, comme un doigt de gant.

D'UN FLEUVE

Aglaé, sœur d'Ophélie,
Prise sans en avoir l'air
Par son mal, par sa folie,
Va se jeter dans la mer.

DE DON JUAN

En Espagne, on orne la rue
Avec des loges d'opéra.
Quelle est cette belle inconnue?
C'est la mort. Don Juan l'aura.

DU CHIEN D'ALCIBIADE

Plus d'un, qui dans la sombre barque,
Traversa le fleuve de mort,
Aurait voulu qu'on le remarque
Pour le contraire de ton sort.

Maintenant, à la mort fidèle,
Dédaigne ton maître inhumain:
Couche-toi, sans queue, auprès d'elle,
Médor, et lèche-lui la main.

LES MESAVENTURES D'UN ROSIER

Rougis des Hespérides!
Et des formes que prend
Le diable au Paradis.

Verges que Noël pose
Dans les sabots, quel feu!
Quelle eau!

Un radis, c'est la rose
En bouton, à l'envers
Dans le tombeau.

Pour tenir chaud l'hiver
Penche l'arbre des pommes
Sur ce rosier.

La rose sans épines,
Dépêchez-vous, garçons;
Elle se ride.

Prenez garde à la berge.
Dans le fleuve de verre
Bouge l'ondine,

Qui mollit les bâtons
Et les montre cassés
Si on l'agace.

Et si change de place
Le rosier en boutons,
La source rit.

Sur sa mousse un pleur d'or
Toucherait-il ce chêne
Au cœur chenu?

Pas même, source blanche,
Larmes du marbre nu
Qui sortent.

Et la rose, la rose
Qui veut imiter l'arbre,
C'est un peu fort!

Une moindre secousse
Dénonce le pari
Champêtre.

Ne laisse pas la voile
Encor, bateau timide,
Cacher ton mât.

Car chaque fois qu'il penche,
Ondine ta maîtresse
Baise tes hanches.

Rose prends donc courage:
La houle et la houlette
Sont sœurs.

Si ce chêne refuse
L'offre de ton odeur
Célèbre,

Rappelle-toi son âge;
Vraiment sa vieille moelle
L'excuse.

Dépâme, rose rouge,
Vois pour cacher ta honte
D'autres boutons.

Rentre dans la vallée
Neige en feu, c'est la fonte
Des Alpes.

Rose que l'aube mouille,
Entre ses seins te place
La bergère.

Si tu mouilles sa robe
Ton audace exagère;
Que dira-t-on?

Rose rouge du crime,
On doit trouver la trace
De l'assassin.

À moins que quelque louve
Vienne lécher le doigt
De la victime.

Sur ce buisson ardent
Arrête-lui la main
Bel ange.

Car une autre bergère,
Qui fut soldat, périt
Sur un bûcher.

Pour l'endormir, échange
Ton sang, contre le lait
De Proserpine.

Il suffit de toucher
Le pavot qui allaite,
Avec vos dents,

Pour que l'ange s'envole
Et laisse une cuisson
Légère.

Chacune des épines
Du rosier rouge blessent
L'amour.

Mieux valait le bocage
Où Narcisse se joue
Seul du pipeau.

Et cet autre vertige
D'un chat noir pelotant
La braise.

Braises du rosier rouge,
Ôtez sur votre peau
Un peu de boue.

Vous avez bien le temps
D'être l'oiseau qui baise
Sa cage

Il faudra redescendre,
Roses du ciel de lit
Louis Seize;

On ne peut pas toujours
Vivre à cette hauteur
D'âme.

Parfois la bière blonde
Succède au lait. La rage
Mollit.

Seul, le grand Alexandre,
Ne versant d'autres larmes,
Les parfumait.

Debout, rosier de mai,
Ce demi-dieu te change
En violette.

Et Cybèle qui pâme,
Change en roses le sang
Des armes.

Rose à la fraîche croupe
Fais vite ta toilette
Du soir.

Épanouis ta gorge,
Tes genoux, tes épaules
Puissants;

Lave ce vieil orage,
Va sur l'enfant de troupe
T'asseoir.

Ce jardin de nounous
Te convient à merveille,
Un dimanche.

Tu peux, malgré ton âge,
Tenir encor un rôle
De sucre d'orge.


L'ondine, dans sa chambre
De verre, n'en peut plus
De rire.

Car la rose naïve
Cherche un nouvel endroit
Pour sommeiller.

Elle roule sa lèvre
Et ses nombreuses joues
Froides.

Elle penche vers l'eau
Sur le talus, sa moue,
Sa fièvre.

Allons! tenez-vous droit
Beau rosier. Faites roides
Vos membres.

L'ondine nous observe,
Et s'amuse beaucoup
À vos dépens.

Jadis, sur l'eau profonde,
Vers Léda vint le cygne
Humain.

La belle, avec sa main,
Flatte le bec, énerve
Le cou.

Or, la fille de l'onde
Songe au feuillage où pend
La vigne;

Et regarde à travers
Le verre du plafond
La rose éteinte.

Rose qu'avez-vous fait
Trop tôt pour que vous tue
L'hiver?

Est-ce là tout l'effet
Jeunesse, que vous font
Les statues?

Et l'ondine, et la feinte
Fontaine sur le socle
De Pan.

Rose, rentre en toi-même,
Et pleure comme Achille
Patrocle.

C'est parfois difficile
D'être seul, quand on s'aime
À deux.


L'ondine de la roche
N'a jamais de hideux
Anges son compte.

Elle prend sa voix d'orgue
Au fond du transparent
Repaire.

Vois son œil bleu, sa paire
De seins que l'eau convexe
Rapproche.

Tremblez, pauvres parents,
Car la belle fournit
La morgue.

Va, rosier de la honte,
L'ondine a défini
Ton sexe.

ALERTE

Rose de Jéricho, les clairons militaires
Mettent partout les murs, les pétales par terre;
Les hôtels, les villas, les kiosques à musique,
La carte en relief, ses cascades, ses chaînes
De montagnes, ses pics qui changent nuit et jour.

Humide est le corail, porte-chance d'amour!
Il te faut rebâtir, rose de vitre et d'arbres,
Parfois bock sur le quai, parfois cime d'un chêne,
Pommier d'Avril souvent, mais plus lourd que le marbre.

On y pose dessus: quêteuses, jeux nautiques,
Le char de la déesse et le combat naval.

Mais la rose s'écroule. Écoutez ce tapage
Nocturne. Car Vénus a découvert le vol
De ses perles, et réveille tous les étages.

LA PEUR DONNANT DES AILES AU COURAGE

(Allégorie)

Mon mal hésite. Un mal s'enfonce. Il entre mal.
Sainte Vierge, ton cœur est trop grand pour le Louvre,
Trop hérissé de fleurs, de flammes, de couteaux.
Gagne le vase bleu de ciel, pour qu'aussitôt
L'assassin disparu, son couteau le découvre.
Une chambre d'hôtel, un ancien journal;

L'odeur des pots rangés intimide la serre.

L'aube était dans ce vieux journal plié en deux,
Froide et difficile à reconnaître. Madame
La reconnaissez-vous? Ciel! c'est la Sainte Vierge,
La Sainte Vierge faite en fleurs, flammes et lames:
Lames de fer, de mer, larmes d'yeux et de cierges,
Et les morceaux cassés de notre vase bleu.
Oui, je la reconnais monsieur le commissaire.

Comment donc firent-ils pour naître d'une trappe
Jésus, Vénus? Noël est ramoneur de neige;
Neige aussi Jeanne d'Arc devant la cheminée.

Mais vous, on construisait dessus, pour votre mois,
Terrasses de mouchoirs, de muguet, de bobèches.

Mon mal semble suspect? mettez la main sur moi:
Le vin rouge du crime est resté sur la nappe.

ANGÉLUS

Coq masqué de viande crue,
Tu es un bourreau, qui l'eût cru?
Voici le ciel, les champs qui saignent,
Et les femmes qui se signent.

PANOPLIE

La figure du tigre est un feu de braise
Qu'on agace avec un tisonnier.
Beau dompteur, dans votre cage à l'aise,
C'est nous qui sommes vos prisonniers.

MIRACLES

Dans votre ville d'eaux, est-il vrai Sainte Vierge,
Que vous apparaissez aux borgnes, aux boiteux?
Des matelots bretons vous virent dans les vergues,
Ce n'est pas moi qui le raconte, ce sont eux.
Vous aviez, dirent-ils, costume d'hirondelle
Sur fond myosotis, sur papier de dentelle:
Au cri du goëland ressemblait votre cri
Quand vous disparaissiez, laissant leur nom écrit.

GABRIEL AU VILLAGE

Mademoiselle Marie
Vous êtes grosse, dit l'ange,
Vous aurez un fils sans mari;
Pardonnez si je vous dérange.

Cette façon d'annoncer
Les choses par la fenêtre,
Étonne un peu la fiancée
Qui son amour voudrait connaître.

L'ange s'en va, comme fonte
Des neiges, vers l'inhumain.
La petite a un peu honte
Et se cache dans ses mains.

CANNE DE JONC

Oreilles, rougissez: je parle
Aux singes de ma volière.

Selon la plume que j'y trempe
La nuit montre le soleil d'Arles,
Ou bien elle allume la rampe
Sur un marquis de Molière,
Rosier aux pattes de pigeon.

Un pigeon vole, un rosier rampe
Ou grimpe, et grimpe le lierre
Et les clownesses de Molier.

Ce poème, particulier
Par la fraîcheur du badigeon.
S'intitule: CANNE DE JONC.

LES OISEAUX SONT EN NEIGE

Les oiseaux sont en neige et ils changent de sexe.
Une robe de chambre a trompé nos parents
Et le frivole amour dont Elise se vexe.
Rébus des papillons, vous m'êtes transparents!

Je te connais, beau masque, et saute sur ta croupe
D'épouvantail naïf qu'une flûte charmait.
On voit dans les romans lus par l'enfant de troupe
Les cerisiers en fleurs, drapeaux du mois de mai.

Lit, folle bergerie, écume Louis Seize,
Notre épitaphe est faite en graines de pavot;
Son souvenir, images debout sur la braise,
D'un tendre madrigal compose un deuil nouveau.

Comme le traîneau russe illumine les louves,
À l'envers, à l'endroit, Narcisse, ton hymen
Inhumain, est-ce un crime après tout? se retrouve,
Trésor de l'onde avare où se lave ta main.

EMBOUCHURE DES PENSÉES DIVINES

Salamine avez-vous un coq dans votre écu?

Et Jeanne d'Arc, dont l'âme est une salamandre.

Voici ma montre en or. Elle n'est pas à vendre.
Âme de nos soldats, secouez votre cendre.

L'encre de chine prend l'empreinte du vaincu.
Le tambour du jazz-band est mon violon d'Ingres.

Capitaine, une noce aurait froid en décembre,
Malgré l'oiseau qui porte un poème en son bec.

Tendre myosotis, œil de la cage aux tigres,
Tigres dont le théâtre est une cheminée,
Brasillez, ronronnez, ne jouez pas avec
La cycliste rêvant, un cœur entre les jambes.

Un tigre, capitaine, aurait-il peur de vous,
De vous, tigre royal! héros de la journée?
Soufflez-lui dans les yeux du Scaferlati doux.

ROSIER SAUVAGE

L'églantine est un piège,
Un cruel ornement
Des guerres enfantines.

Sade, marquis charmant,
Voleur des églantines,
Rougit sa main d'amant.

Il signe sur la neige,
Et sur la glace ment
Avec un diamant.

CONTREBANDE

Encor Vénus reine des reines,
Bel œuf de Pâques entr'ouvert.
Le coq laisse tomber ses graines
D'un bec fraîchement peint en vert.

C'est fait! Avant qu'il ne retombe,
Un couteau planté dans le sein,
Ce coq, espèce de colombe,
Dit le nom de son assassin.

Coq de l'île d'amour. Pédale,
Cycliste rose! Un blond tabac
Humide cache le scandale:
Charmant numéro d'Alhambra.

Une mandoline, c'est celle
Qui sur la Marne naviguait;
Maintenant la voici ta selle
Que mouille un bouquet de muguet.

LA CABANE ABANDONNÉE

L'écriture des églantines
Est un vrai fantôme grivois;
Hirondelles sont tes bottines
Annonçant l'orage. Les voix
(Rires et rondes enfantines)
Doivent sortir d'un appareil
À celui de Jeanne pareil.

Souvent l'indiscret photographe
Sous un jupon voit le soleil.
Cœur tu savais mal l'orthographe,
Mais l'ancre dénonce un marin,
Et sa vague sur ce terrain
Vague, te baptisa. Parrain,
Recopiez-nous l'épitaphe.

PRIMEURS CRUELLES

Une flèche, parfois, guérit un cœur malade.
Hallucinations, ouvrez-moi cet oursin
D'aurore. Je veux être aussi le médecin
Qui, voleur de joyaux, éventre une grenade.

La Sainte-Vierge avait envoyé ce dessin
D'un bleu miraculeux à chaque camarade.
Ils n'en soufflèrent mot avant d'entrer en rade;
C'était un petit peu à gauche sous le sein.

Pourquoi mentir, sommeil? S'il vous faut des otages,
Voici la caisse à fleurs, monticule d'étages
Parfumés, et la corde et l'œuf des scorpions.

Car si le douanier agrandit votre fente
Grenades, simulant robes et lampions,
Il met la main sur tous les rubis de l'infante.

COSTUME DE SPORT

Le vent de la mer renversa
Sur la baigneuse une cabine.
C'est du tir à la carabine,
Zèbre joli comme un forçat.

Le tout s'il raye son plumage
(Et le mieux serait le plus tôt)
Pour un arrangement d'images
À la façon de Jean Cocteau.

CHANGEMENTS À VUE

Clef de sol, êtes-vous la clef des champs? Je raye
Ta vitrine, fleuriste, éprise de wagons.
La mer, la mer murmure au fond de notre oreille;
S'il faut partir, je pars, tu pars, nous naviguons.

Ces livres sont trop gros pour la belle qui charme
Les serpents enroulés aux arbres interdits.
Méfions-nous: souvent le serpent est une arme,
Sa tête un revolver dans la main des bandits.

L'hercule du tréteau, qui mange de la neige,
Vous a vaincu, monsieur l'athlète déloyal!
Rendez cinquante francs, on vous tendait un piège;
On ne s'attaque pas au vieux tigre royal.

La princesse imprudente a meublé sa piscine
Avec des anges nus, habitants de Chaillot.
Dame, si vous voulez que l'on vous assassine,
C'est simple, montrez-leur votre grâce en maillot.

Dans ce chiffre superbe, écrit en majuscules,
On voit singes grimpeurs, œuvre de l'amiral,
Qui dessinait parfois, ou bien, au crépuscule,
En bouteille mettait lui-même son journal.

CALENDRIER MÉCANIQUE

D'ici, de là, d'ailleurs joufflue,
Vénus fait le tour de l'îlot.
Et les pneus, elle les regonfle,
Rien qu'en caressant son vélo.

Ce vélo nargue nos régates,
Nos bras nus, nos nœuds papillons;
Mon enfance est loin, nougatine
Qui me colle encore aux papilles.

Car, protectrice des artistes,
La reine quitte son château,
Vient à bicyclette et baptise
De champagne notre bateau.

LES ANGES MALADROITS...

Les anges maladroits vous imitent, pigeons.
Vous saluez Marie. Eux, devant les guérites,
Gardent la France. Hélas! nous les décourageons.
Toute la nuit, le ciel cueille des marguerites:
La dernière cueillie on ouvre les volets.

Voici venir l'automne et la chute des anges;
Les anges répandus comme le pot au lait.

Arbre en or l'Opéra donne beaucoup d'oranges;
C'est surtout vers le haut que le public les mange.
Car, vers le bas, manger des oranges déplaît.

Ce poème en dix vers est-il beau, est-il laid?
Il n'est ni laid ni beau, il a d'autres mérites.

ARCHE

Vent, démolis nos casernes.
Sur ma fenêtre, le coq
Veut la tête d'Holopherne
Aveugle et le cou en loques.

Clairon, réveille Palerme,
Ville aimant dormir en pente.
Mille étoiles sous le poing
Du nègre nu, mille bombes,
Dans l'île feront l'appoint.

Crête rouge de Colomb
Annonce la mer repeinte
Chez la reine des colombes.

MOUCHES, DISTRACTIONS

Plutôt que voir tout nu ce nègre à l'île d'Ambre
Virginie en mourant fait mine de dormir.
Miracle! mon fauteuil s'envole de la chambre,
Sur un air d'opéra, sur un tapis d'Emir.

Quel beau feu d'artifice, un ange! Dans l'étable,
Après, il se repose et ferme ses ciseaux.
Le même ange indiscret, scandale épouvantable,
Découvrit Saint-François, marchant sur les oiseaux.

L'hiver est caramel, boîte au lait, pot à colle,
Plâtre grec dont l'oeil cabre un antique cheval.
Aux classes de dessin, le dernier à l'école,
Pour cacher son amour n'eut jamais de rival.

SONNET

Aujourd'hui le soleil, redoutable artifice,
Pousse vers la vitrine un nouveau bûcheron;
Le diamant d'amour y fait sa cicatrice
Lisible sur le ciel blessé par le clairon.

Feu! pour mes longs hivers la flamme est écrevisse
Joyeuse, ou bien Diane en chasse à l'escadron.
Absinthe verte ou vert billard, un même vice,
Fait de votre journal l'unique liseron.

Hôtel peu cher devant la Méditerranée,
De tous les matelots morgue où Vénus est née,
Char fleuri sous l'orage, et rage de Didon

Qui meurt debout sur un lustre de tragédie,
Forçat, zèbre craintif caché sous l'édredon,
Votre troupe en chemise excite l'incendie.

GRECO

Puis-je, grenouille morte, en l'eau vous trouver laide,
Semblable aux jeunes gens du peintre de Tolède,
Ainsi leur jambe flotte et leurs doigts écartés.

Les nuages de linge et d'électricité,
Bâtissent les maisons, les rocs de leur cité.
Ils attirent la foudre, ils appellent à l'aide.

Morte vue à l'envers et de tous les côtés.

L'ENDROIT ET L'ENVERS

Je vois la mort en bas, du haut de ce bel âge
Où je me trouve, hélas! au milieu du voyage;
La jeunesse me quitte et j'ai son coup reçu.
Elle emporte en riant ma couronne de roses.
Mort, à l'envers de nous vivante, tu composes
La trame de notre tissu.

Nous ne pouvons te voir et te sentons mêlée
Aux plaisirs, à l'amour dont la chaleur ailée
Fait les cœurs les plus durs, comme neige dissous;
Bien que tes habitants reposassent dans l'herbe,
Nous marchions sans souci sur l'étoffe superbe,
Et, soudain, nous sommes dessous.

Nous sommes tellement proche la douce vie
Qu'à peine par la mort elle nous est ravie,
Elle ouvre le passage et nous lâche la main.
Quelquefois nous cherchons à vaincre le mystère,
Par le même chemin revenir sur la terre;
Il n'existe plus de chemin.

Vivants nous avons beau, toute notre existence,
De la terre au soleil mesurer la distance
Et pour ne point mourir faire nombre d'apprêts;
Nous lisons un côté de la page du livre;
L'autre nous est caché. Nous ne pouvons plus suivre,
Savoir ce qui se passe après.

Je vois la mer trop courte et qui toujours enlève
À la grève un baiser pour baiser l'autre grève:
La menteuse fort bien arrange ses instants.
Bientôt l'imitera ma maîtresse fidèle,
Cherchant ailleurs Avril, ainsi que l'hirondelle.
Hélas! je vais avoir trente ans.

Trente ans! Vous moquez-vous? C'est la grâce des marbres,
Le soleil de midi qui tombe sur les arbres,
Votre pas de trente ans est votre premier pas.
Jusqu'alors vous étiez une folle semaille;
Vous allez... Taisez-vous. Regardez-moi. Je baille.
Je ne vous écouterai pas.

Je ne veux mensonger avec ce qui me joue,
La rose de mon cœur ses pétales dénoue,
Et, même si je dois vivre longtemps encor,
Qu'importent le soleil et les marbres de Grèce;
Jusqu'ici j'apprenais la vie; elle me blesse.
Il me faut apprendre la mort.

Car votre auberge, ô mort, ne porte aucune enseigne.
J'y voudrais voir, de loin, un beau cygne qui saigne
Et chante, cependant que lui tordez le cou.
Ainsi je connaîtrais ce dont je ne me doute:
L'endroit où le sommeil interrompra ma route.
Et s'il me faut marcher beaucoup.

Certes, vous vous couchez comme un ange de neige,
Plus que le bronze lourd, plus léger que le liège,
Sur l'amant dont le spasme enfin vous réjouit;
Sous votre feu glacé la chair se fait statue,
Mais, à la longue, il faut, mort, que je m'habitue
À vous recevoir dans mon lit.

Votre désir ne sait ni l'âge ni le sexe,
Nul d'entre les plus beaux que votre dédain vexe,
Malgré tout, votre amour attire les amants.
Votre baiser, parfois, d'une honte les venge,
Ou bien vous vous couchez entre les deux, bel ange,
Pour d'obscurs assouvissements.

Mieux que Vénus, ô mort, vous habitez nos couches,
Vous arrêtez nos cœurs, vous tourmentez nos bouches,
Vous nous fermez les yeux et vous nous rendez sourd.
Vous donnez à Vénus un visage ordinaire,
Car, jusqu'à maintenant où je crains de vous plaire,
J'avais peur ainsi de l'amour.

Rivale de Vénus, qu'on me roule et me couse
À jamais dans les draps où votre ange m'épouse;
Qu'il ne me quitte plus, je suis un fils de roi.
Et, qu'à l'envers couché, sentant son aile contre.
Il me parle de vous, mais jamais ne me montre
Tout ce que je laisse à l'endroit.

M'ENTENDEZ-VOUS AINSI?

France gentille et verdoyante,
Qui fait les femmes et le vin
Comme on en chercherait en vain
Sur toute Europe environnante,

Si je te chante à ma façon,
Chacun se détourne et me moque,
Mais un jour arrive l'époque
Où l'oreille entend la chanson.

Tel qui jadis me voulut mordre,
Voyant ma figure à l'envers,
Comprendra soudain que mes vers
Furent les serviteurs de l'ordre.

Il sera vite mon ami,
Disant: Commit-il autres crimes
Que de distribuer ses rimes
Tant au bout des vers que parmi.

Courage! Ronsard te l'enseigne;
Car, s'il est aujourd'hui vainqueur,
La rose lui perça le cœur
Comme oiseau dont la gorge saigne.

L'homme ne ressent pas l'effet
D'un rossignol au chant diurne.
Et mieux le convainc, dans une urne,
Notre cœur en cendres défait.






End of the Project Gutenberg EBook of Vocabulaire,  Poèmes, by Jean Cocteau

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including legal fees, that arise directly or indirectly from any of
the following which you do or cause to occur: (a) distribution of this
or any Project Gutenberg-tm work, (b) alteration, modification, or
additions or deletions to any Project Gutenberg-tm work, and (c) any
Defect you cause.

Section 2. Information about the Mission of Project Gutenberg-tm

Project Gutenberg-tm is synonymous with the free distribution of
electronic works in formats readable by the widest variety of
computers including obsolete, old, middle-aged and new computers. It
exists because of the efforts of hundreds of volunteers and donations
from people in all walks of life.

Volunteers and financial support to provide volunteers with the
assistance they need are critical to reaching Project Gutenberg-tm's
goals and ensuring that the Project Gutenberg-tm collection will
remain freely available for generations to come. In 2001, the Project
Gutenberg Literary Archive Foundation was created to provide a secure
and permanent future for Project Gutenberg-tm and future
generations. To learn more about the Project Gutenberg Literary
Archive Foundation and how your efforts and donations can help, see
Sections 3 and 4 and the Foundation information page at
www.gutenberg.org Section 3. Information about the Project Gutenberg
Literary Archive Foundation

The Project Gutenberg Literary Archive Foundation is a non profit
501(c)(3) educational corporation organized under the laws of the
state of Mississippi and granted tax exempt status by the Internal
Revenue Service. The Foundation's EIN or federal tax identification
number is 64-6221541. Contributions to the Project Gutenberg Literary
Archive Foundation are tax deductible to the full extent permitted by
U.S. federal laws and your state's laws.

The Foundation's principal office is in Fairbanks, Alaska, with the
mailing address: PO Box 750175, Fairbanks, AK 99775, but its
volunteers and employees are scattered throughout numerous
locations. Its business office is located at 809 North 1500 West, Salt
Lake City, UT 84116, (801) 596-1887. Email contact links and up to
date contact information can be found at the Foundation's web site and
official page at www.gutenberg.org/contact

For additional contact information:

    Dr. Gregory B. Newby
    Chief Executive and Director
    gbnewby@pglaf.org

Section 4. Information about Donations to the Project Gutenberg
Literary Archive Foundation

Project Gutenberg-tm depends upon and cannot survive without wide
spread public support and donations to carry out its mission of
increasing the number of public domain and licensed works that can be
freely distributed in machine readable form accessible by the widest
array of equipment including outdated equipment. Many small donations
($1 to $5,000) are particularly important to maintaining tax exempt
status with the IRS.

The Foundation is committed to complying with the laws regulating
charities and charitable donations in all 50 states of the United
States. Compliance requirements are not uniform and it takes a
considerable effort, much paperwork and many fees to meet and keep up
with these requirements. We do not solicit donations in locations
where we have not received written confirmation of compliance. To SEND
DONATIONS or determine the status of compliance for any particular
state visit www.gutenberg.org/donate

While we cannot and do not solicit contributions from states where we
have not met the solicitation requirements, we know of no prohibition
against accepting unsolicited donations from donors in such states who
approach us with offers to donate.

International donations are gratefully accepted, but we cannot make
any statements concerning tax treatment of donations received from
outside the United States. U.S. laws alone swamp our small staff.

Please check the Project Gutenberg Web pages for current donation
methods and addresses. Donations are accepted in a number of other
ways including checks, online payments and credit card donations. To
donate, please visit: www.gutenberg.org/donate

Section 5. General Information About Project Gutenberg-tm electronic works.

Professor Michael S. Hart was the originator of the Project
Gutenberg-tm concept of a library of electronic works that could be
freely shared with anyone. For forty years, he produced and
distributed Project Gutenberg-tm eBooks with only a loose network of
volunteer support.

Project Gutenberg-tm eBooks are often created from several printed
editions, all of which are confirmed as not protected by copyright in
the U.S. unless a copyright notice is included. Thus, we do not
necessarily keep eBooks in compliance with any particular paper
edition.

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facility: www.gutenberg.org

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