The Project Gutenberg eBook of Silence En Otage: Poésie

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Title: Silence En Otage: Poésie

Author: Huguette Bertrand

Release date: December 1, 2003 [eBook #4741]
Most recently updated: June 20, 2020

Language: French

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Silence en otage,
poésie

by Huguette Bertrand

[Illustration]




RACINE

Au mouvement des sources
nos mères spongieuses
à la terre
enracinées
s'agrippent aux foetus
déjà mûrs
de l'automne achevé

entre leurs cuisses
le balbutiement des multitudes
jusqu'à la lie des voix






RETOUR


Arrachés aux saisons
les cris d'un fleuve
usent les paysages
l'eau de l'enfance

sculpté de larmes
ce ruisseau sacré
pose nonchalant

et belle sera la passion
d'un verger secret
et belle la clarté
du nombre des jours

 

DISTANCE

Blottie dans un silence
la phrase amoureuse
consent à l'existence
à ses métamorphoses
créant un rêve décuplé
maintenu à une distance
parfaite

ses manières retardent
la venue des saisons mortes
sur la feuille usée
conjuguent la détente
à la verdeur des amants
convaincus
que les vaches paissent
aux flancs des heures





 

NOIRTÉ

Une totalité
une précision
un mot total et précis
qu'une nuit galvaude
dans le silence des garde-robes
sous la toison lunaire
camoufle l'usure des pyjamas

il meurt content
ce génie de l'ombre
dont la phrase a chuté
dans les abysses de la lumière
chef-d'oeuvre ailé
emprisonné dans la parole

il fait toujours monstre
luit le noir



 

SONGES

Sous la mer moutonneuse
des petites morts amoureuses
chevelures d'algues
reliées au visage
immolé de l'otage
leurs jeux tentaculaires

tout en songes
et rond le jour
le corps gercé de mots mâles
et femelles
remue les os





 

SOUFFLE

Allongés sur une solitude
des coeurs entassés proclament
un vertige ancien
que seul
le silence afflige

obsédées
leurs lèvres d'argile enfièvrent
les dépouilles provocantes

engourdissement du paysage
émerge
un souffle bleu-cri



 

EXCÈS

Jusqu'à la fin du corps
cette senteur d'épouvante
décapant à la rude tâche
de nos amours grattant
l'éternité

inquiétantes silhouettes
au matin s'enflent roses
elles maquillent leurs cris
d'un excès d'au-delà





 


LES ABSENTS


En regard de nos mains
recueillies
les musiques ont sombré
dans une vaste mare de boue
et tous les yeux
ont suivi
la silhouette du silence
vers des ombres à rayures
d'enfants sales
ont pillé
tous les jeux des absents

 

 

MUTILATION

Vieil azur
le corps mime la mort
la peur figée sur l'oeil

au temple des lèvres
le dernier cri
du temps mutilé

saccagé
le vide explore le fruit
d'un bruit de chair
la douleur immolé





 

ENVOL

Un discours
un espace blanc
et tout ce remplissage du silence
qu'on verse sur le père
la mère
les enfants
et mémère dans la dramaturgie
ordonnée
multipliée par l'espace-temps

on le retrouve en double
en triple
en quadrimoteur
sur les ailes du langage
elle flotte
sur la masse totale du poème
étriqué(e)



LES VIEUX

Jeunes dieux fripés
ils pratiquent le silence
les vieux
dans le bar enfumé de leurs rêves
font profession de mémoire
et c'est dans la rosée de leurs regards
que trempent nos coeurs délicats

les vieux vont et reviennent
traversent nos pas endoloris
de l'épaule à la hanche
ont le trépas allongé
et le sourire
fleuri

lorsqu'ils viennent tout près
les vieux
leurs mots saignent d'azur
sur nos couchants

récifs argentés des échouages
qu'un poil de chat
fait éternuer




 


LA REPOUSSE


Couchée dans le duvet de l'automne
je crie en silence
sous le pluie verte
et sourde
mon corps détrempé
ramollit
et que viennent les mouches
braconner sur les restes
de ma folie

entourez-moi de vos bruits d'ailes
enterrez-moi comme un hasard
jusqu'à la prochaine repousse