The Project Gutenberg eBook of L'Illustration, No. 3240, 1 Avril 1905

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Title: L'Illustration, No. 3240, 1 Avril 1905

Author: Various

Release date: November 17, 2010 [eBook #34349]

Language: French

*** START OF THE PROJECT GUTENBERG EBOOK L'ILLUSTRATION, NO. 3240, 1 AVRIL 1905 ***







L'Illustration, No. 3240, 1 Avril 1905


(Agrandissement)


LA VISITE SENSATIONNELLE DE GUILLAUME II A TANGER
L'empereur d'Allemagne, vêtu de l'uniforme spécial, avec burnous et casque colonial, qu'il a composé, à l'occasion de son voyage à Jérusalem, pour frapper l'imagination des musulmans.
D'après une photographie.]


COURRIER DE PARIS

JOURNAL D'UNE ÉTRANGÈRE

Cela est arrivé sans qu'on y pensât, comme presque tout arrive: une tiédeur dans l'air, je ne sais quoi de plus gai, le matin, dans la lumière du soleil, une éclosion soudaine de millions de petits points verts aux arbres de mon Luxembourg, un cerisier tout blanc découvert ce matin dans le jardinet d'une maison de Montmartre, où j'allais déjeuner;--et voilà le printemps. Je me sens joyeuse, sans savoir pourquoi, et il me semble que ce divin rajeunissement des choses répand de la jeunesse aussi dans les yeux des gens qui passent.

J'ai gagné Montmartre à pied. Il était midi. Et je pensais que Baedeker nous renseigne bien mal sur les vraies beautés de Paris. Il nous recommande la visite des catacombes, de Carnavalet, du Louvre et du Père-Lachaise; il nous parle des monuments célèbres qu'il faut voir; il cite les théâtres où il faut être allé, et il ne dit rien du plaisir charmant de faire, à midi, l'ascension de la rue Lepic par une jolie journée de printemps!

C'est l'heure du déjeuner. La rue est pleine de passants pressés, de jeunes gens, d'ouvrières en cheveux qui rient, jacassent, s'interpellent. On a très faim. Les devantures des restaurants et des crémeries sont ensoleillées, et cette bousculade autour des petites tables où l'on vient, en hâte, manger le «plat du jour» a la gaieté d'une récréation d'école. Aux étalages des poissonniers et des charcutiers resplendit la polychromie des pâtés, des saucissons, des coquillages, des choses amusantes à manger et qui sont la joie des repas de midi. Sur la chaussée, l'agent montre un visage moins sévère aux petites marchandes dont les voitures et les paniers s'attardent; les fiacres ont une allure de paresse; des odeurs délicieuses s'exhalent des rôtisseries,--et de quelques loges de concierges, où règne un abandon de ripaille douce; et l'on voit des maris affamés se hâter vers la salle à manger conjugale, avec un bouquet de violettes de deux sous dans la main.

On est de bonne humeur aussi parce que c'est aujourd'hui jour de fête, et parce que tout à l'heure défileront sur le boulevard voisin, dans le vacarme des fanfares, les chars fleuris des lavoirs et des marchés. Sous la pluie des confettis, du haut des chars en carton doré, les petites reines souriront aux clameurs des badauds. Mi-Carême! On ne chôme officiellement nulle part aujourd'hui; mais on flâne un peu partout. Jour de fête? Non, pas tout à fait. Jour de «flemme», plutôt. Et le Paris des faubourgs est délicieux à regarder dans ces minutes-là. Je voudrais comprendre de quoi ce charme est fait, d'où vient la grâce de ce décor très vulgaire, et pourquoi ces petites Montmartroises sans beauté donnent à mes yeux plus de joie que les femmes les plus jolies de n'importe où?

Il est vrai que nous nous exagérons le pouvoir de la beauté. La beauté n'est qu'un des moindres moyens qu'une femme ait de plaire; et Paris, depuis huit jours, est aux pieds d'une étrangère qui doit à d'autres mérites la gloire de l'avoir conquis.

Cette réapparition de la Duse au Nouveau-Théâtre est l'événement de cette semaine. On s'occupe bien un peu de la marche d'Oyama sur Kharbine, du voyage de l'empereur Guillaume à Tanger et de la séparation des Eglises et de l'État; mais ce ne sont là, pour l'instant, que des incidents qu'un souci plus passionnant domine: celui d'aller entendre la Duse dans la Femme de Claude ou dans la Dame aux Camélias.

J'ai fait comme tout le monde; je suis allée entendre la Duse. C'est vrai; cette comédienne n'est ni très élégante, ni très jolie, ni jeune. Qu'importe!

Elle est mieux que tout cela. Elle est la Femme; elle est la créature délicieuse et tragique dont le génie consiste à sentir, à exprimer la vie humainement, et de qui le geste et l'expression empruntent à cette intelligence parfaite des choses de son art je ne sais quel charme douloureux et quelle noblesse qui me font trouver médiocre, à côté d'elle, la plus éclatante beauté des autres.

Hier soir, dans un salon d'universitaires, une dame disait:

--Il faut envier la Duse. Il faut envier les grands comédiens et les grandes comédiennes. Ceux-là auront vraiment connu la gloire incontestée, bruyante, universelle...

--Non, répondit quelqu'un; leur sort n'est point si digne d'envie. Ces grands artistes n'ont été que l'instrument du génie des autres; ils n'ont rien créé; ils mourront sans laisser de leur gloire autre chose qu'une trace légère, impondérable: un souvenir...

Mon voisin, le plus spirituel de nos auteurs dramatiques, écoutait ces propos en souriant. Il se pencha vers moi, et tout bas:

--Ce philosophe est un serin, madame; il dit là quelque chose qui «a l'air d'une pensée» et qui ne signifie rien du tout.

» Il est vrai qu'il ne restera de la Duse, dans trente ans, que le témoignage des contemporains qui l'auront acclamée et qui expliqueront à nos fils pourquoi cette femme délicieuse était digne qu'on l'admirât. Personne n'entendra plus la musique bouleversante de sa voix; personne ne goûtera plus la joie de comprendre et d'aimer, par elle, les écrivains dont elle incarna la pensée; la vérité de son geste, l'expression si émouvante de son visage douloureux ne s'évoqueront qu'en quelques images, à peu près «ressemblantes», que la postérité respectera, et ce sera tout.

»Mais ne trouvez-vous pas que cela est déjà fort joli? Ils ne sont pas si nombreux, savez-vous, les grands hommes dont le culte est entretenu dans nos mémoires autrement que par le souvenir du bien que leurs contemporains ont pensé d'eux; et je ne vois pas en quoi le «cas» de la Duse, de Mme Sarah Bernhardt, d'Irving ou de Coquelin diffère de celui de beaucoup de personnages dont les statues, si vilaines en général, ornent nos jardins. Diderot et Renan nous ont laissé des livres, Rubens nous a laissé des tableaux, Carpeaux des statues, Mansart des monuments, le père Wallon une Constitution, Pasteur quelques découvertes sublimes, Lesseps le canal de Suez, et M. Naquet nous laissera la loi sur le divorce. Mais le docteur Esculape et le général Augereau ne nous ont rien laissé du tout, si ce n'est le souvenir avantageux qui s'attache à la réputation médicale de l'un et aux vertus militaires de l'autre. Leur gloire en est-elle moins solide? Au surplus, notez qu'il n'est pas sûr que le souvenir de certaines pièces où nous acclamons la Duse ne périsse pas bien longtemps avant que soit oublié le nom de l'artiste qui les interpréta. Talma joua génialement des tragédies assommantes, et nous continuons de glorifier Talma, sans même nous préoccuper de savoir par qui cet ouvrages furent écrits. Ils existent cependant, ces ouvrages-là. Ils nous sont légués par de petits ou grands poètes qui probablement méprisaient les comédiens de leur temps et se vantèrent de laisser, eux, «quelque chose» à la postérité.

»Voyez-vous, madame, il ne faut jamais être trop fier de ce qu'on laisse à la postérité. Des oeuvres qu'on acclama s'oublient; de très bons livres se démodent; (sait-on ce que penseront des cent volumes de ce prodigieux Jules Verne, qui fut l'enchanteur de notre enfance, les écoliers de l'an 2000?) tout passe... On est en train de refaire le Code civil, et le Parthénon perd quelques pierres tous les jours...»


Il est même question de le restaurer; et j'entends parler d'un congrès d'archéologues qui doit s'assembler à Athènes ces jours-ci, dans le but d'examiner ce grave problème. Faut-il ou ne faut-il pas restaurer? Les journaux ont déjà publié là-dessus les opinions de toutes sortes de personnes; ils ne nous ont rien dit (sans doute parce qu'ils l'ignorent) de l'opinion du roi, qu'il faudra pourtant consulter. Je la connais, cette opinion, parce qu'un jour, à Aix-les-Bains, un diplomate ami de Sa Majesté voulut bien me la confier tout bas. La voici: le roi Georges a horreur des vieilles pierres, et l'une des choses qui l'agacent le plus au monde--- à ce qu'on dit--c'est le Parthénon.

Je comprends ce sentiment-là. Ce souverain, très aimable et très vivant, sent peser sur lui trop lourdement la gloire de trop de morts. Il voudrait être autre chose que le gardien d'un cimetière où l'univers défile chapeau bas, et nous l'assommons avec nos prières sur l'Acropole. Il souhaiterait autour de lui plus de vie et moins de ruines, et plus de pavés neufs et de rails de chemins de fer à la place de tant de marbres effondrés. Il se sent humilié de nous voir fonder chez lui des écoles où l'on ne daigne s'intéresser aux gens et aux choses de Grèce qu'à condition qu'ils soient âgés de plus de deux mille ans. Lui demande-t-on d'ouvrir un stand aux hommes de sport de l'étranger, c'est pour y recommencer les jeux Olympiques; et, si des artistes décident de s'assembler en congrès dans Athènes, c'est pour s'y occuper de Phidias.

Alors je me figure très bien ce que doit, de temps à autre, apercevoir dans ses rêves ce très bon roi: une Grèce toute neuve, modernisée, nettoyée des débris augustes qui encombrent son sol, et défigurée par la science, délicieusement; avec des trolleys partout, des palais ripolinés, des usines pleines de bruit, des cheminées plus hautes que celles de Glasgow et dont les fumées balafreraient de leurs panaches noirs l'azur abrutissant de l'Attique; et puis, çà et là, des théâtres décorés par Chéret, où l'on jouerait éperdument la Belle Hélène...
SONIA.




            M. Catulle Mendès chez lui.

M. CATULLE MENDÈS

L'auteur de Scarron--la belle» comédie tragique» qui vient de triompher au théâtre de la Gaîté et que l'Illustration va publier--jouit d'une trop grande notoriété pour qu'il soit besoin de lui consacrer une biographie. Mais, en cette occurrence, un portrait tout récent, montrant l'éminent écrivain dans son cabinet de travail, agréera certainement au public, toujours curieux d'observer la physionomie des notoires contemporains «chez eux». Ce portrait offre d'autant plus d'intérêt qu'il atteste, en sa sincérité, l'étonnante verdeur de l'original. M. Catulle Mendès accomplira bientôt, sa soixante-quatrième année; or, plus de quarante ans de labeur littéraire n'ont ni atteint sa vigueur, ni épuisé la veine si riche que lui départirent de bonnes fées. Il continue de cumuler sans défaillance les besognes les plus variées, passant allègrement de la prose aux vers, du livre à l'article, du journal au théâtre. Et ce critique qui consacre tant d'heures de sa vie active à l'audition et au compte rendu des pièces des autres, trouve encore le temps d'en écrire lui-même de tout à fait remarquables!



JULES VERNE


JULES VERNE ET Mme JULES VERNE

Avec Jules Verne, qui vient de mourir dans sa soixante-dix-huitième année, disparaît un des écrivains les plus notoires du dix-neuvième siècle. Il a publié près d'une centaine de volumes, et certes un pareil bagage atteste une puissance de production peu commune; mais cette prodigieuse fécondité ne fut ni l'unique ni le principal mérite du laborieux auteur de toute une encyclopédie: il a d'autres titres, et supérieurs, à une célébrité du meilleur aloi.

Premièrement, il a été un novateur. «M. Jules Verne remplace les merveilles de la féerie par un merveilleux nouveau dont les notions récentes de la science font tous les frais. L'intérêt, habilement soutenu, y tourne au profit de l'instruction. On en rapporte, avec le plaisir d'avoir appris, le désir de savoir, la curiosité scientifique.» Ainsi s'exprimait, il y a quelque quarante ans, M. Patin, en un rapport sur les lauréats de l'Académie française. On ne saurait mieux définir le genre de littérature auquel reste attaché désormais le nom de son créateur. Celui-ci, d'ailleurs, prouva dès ses débuts qu'il y excellait; il y avait acquis une telle maîtrise que, s'il a fait école, il n'a pas trouvé d'imitateurs capables de l'égaler.

En 1861, un essai remarqué, Cinq semaines en ballon, apporté au Magasin d'éducation et de récréation, ouvrait la longue série des Voyages extraordinaires éditée par la maison Hetzel. Depuis cette époque lointaine, les ouvres de Jules Verne, en s'accumulant, ont formé une énorme collection. A quoi bon en dresser la liste ici? N'est-elle pas inscrite, pour ainsi dire, dans la mémoire de toute une génération? N'ont-elles pas eu, n'ont-elles pas encore des millions de lecteurs? N'ont-elles pas fourni, ne continuent-elles pas de fournir à la jeunesse le gros contingent des livres de prix et d'étrennes, aux bibliothèques scolaires et populaires un de leurs fonds les plus précieux? Et que de fois l'éditeur a reçu les doléances de bibliothécaires sollicitant le remplacement de leurs volumes, hors d'usage à force d'avoir été maniés! Ce simple fait matériel vaut d'être noté en passant, comme preuve décisive de la vogue persistante d'un auteur.


Jules Verne sur son lit de mort.--Phot. Douard.

La renommée de Verne ne se borne pas à la France, elle est universelle; ses ouvrages ont été traduits en toutes langues, même en arabe, en chinois, en japonais.

Le Chah de Perse, feu Nasser-ed-Din, se les faisait lire par le docteur Tholozan, notre compatriote, attaché à sa personne, et il y prenait un plaisir extrême, comme jadis son prédécesseur, Shehriyar, aux contes des Mille et une Nuits.

Mais c'est surtout dans les pays anglo-saxons qu'ils sont le plus répandus et goûtés: là, en raison de la tournure d'esprit propre à la race, on apprécie particulièrement la part importante que ces récits captivants laissent au réel à côté de la fiction, à la science à côté de
     Maison d'Amiens où Jules
     Verne écrivit la plupart
             de ses oeuvres.

            --Phot. Douard.
l'idéal; puis, un autre motif encore leur assure le bénéfice de cette prédilection: on y voit une des formes à la fois les plus claires, les plus substantielles et les plus saines de la littérature française, où ils représentent en quelque sorte le «classique» du romanesque et de la fantaisie.

Trait caractéristique, le narrateur des Voyages extraordinaires et de tant d'entreprises aventureuses n'était ni un voyageur ni un coureur d'aventures; sur son yacht, le Saint-Michel, il ne pratiqua guère la navigation au long cours. C'était plutôt un sédentaire; de son fauteuil, de sa table de travail chargée de cartes et de documents, sa vive imagination, dont il savait régler l'essor par une discipline méthodique, l'emportait vers de lointains rivages, des îles mystérieuses, des régions inexplorées et bien au delà du monde terrestre.

Durant près d'un demi-siècle, ce travailleur infatigable, debout dès six heures, consacra la matinée à sa tâche quotidienne; cette régularité, strictement observée jusqu'à la fin, lui permit d'édifier le monument considérable que viendront compléter plusieurs oeuvres posthumes.

Originaire de Nantes, Jules Verne habitait depuis plus de trente ans Amiens, ville natale de sa femme.

Il y menait, avec sa dévouée compagne, une existence bourgeoise, dans la paisible uniformité des habitudes provinciales; sa besogne professionnelle achevée, il cultivait son jardin, comme il sied au sage et au bon propriétaire; mais il eût cru manquer à un devoir en ne donnant pas une partie de son temps aux affaires de sa cité d'adoption, dont il fut un des conseillers municipaux les plus zélés. Les Amiénois étaient justement fiers de leur éminent concitoyen: ils ont eu d'autant plus à coeur de lui faire de belles funérailles qu'ils avaient conscience, tout en rendant hommage à une illustration locale, de célébrer un deuil national.
Edmond Frank.


Le corbillard au moment où l'on va y placer le cercueil
La famille (au premier rang: le fils et le petit-fils de Jules Verne.

LES OBSÈQUES DE JULES VERNE A AMIENS.




Le départ de l'empereur Guillaume II, de Cuxhaven (Hambourg), à bord du «Hamburg».
--Phot. Strumper.

L'EMPEREUR D'ALLEMAGNE A TANGER

L'empereur Guillaume II se plaît aux coups de théâtre. Très personnel, il se réserve volontiers les démarches diplomatiques qui doivent faire éclat. On n'a pas oublié son télégramme au président Kruger, et le souvenir du fastueux voyage de Jérusalem s'impose à l'esprit, lorsqu'on parle du voyage de Tanger.


Le capitaine Fournie, officier français commandant
       les troupes de Tanger, qui dirigera le service
           d'ordre, lors de la visite de Guillaume II.

Ce n'est que le 20 mars qu'on apprit, de Tanger, que l'empereur visiterait ce port dix jours après, au cours de son voyage, par mer, de Cuxhaven à Taormina (Sicile), avec escales à Lisbonne et à Gibraltar. La visite tombait au milieu des négociations que mène, dans la capitale lointaine du Maroc, Fez, notre ministre, M. Saint-René-Taillandier, et au moment où se manifestaient des résistances à l'adoption de notre programme de pacification civilisatrice. Etaient-ce donc ces résistances que l'empereur, par sa visite, se proposait d'encourager?--Pour se garder des exagérations où quelques uns sont tombés complaisamment, il suffit de rappeler quelques faits:

Le 12 avril 1901, quatre jours après l'arrangement anglo-français, à la tribune du Reichstag le chancelier de l'Empire déclarait: «Au point de vue des intérêts allemands, nous n'avons rien à objecter contre cette convention... En ce qui concerne sa partie capitale, c'est-à-dire le Maroc, nos intérêts dans ce pays, comme en général dans la Méditerranée, sont d'ordre principalement économique. Nous avons, nous aussi, grand intérêt à ce que l'ordre et la paix règne dans le pays. D'autre part, nous n'avons aucun motif de craindre que nos intérêts économiques au Maroc soient mis à l'écart ou reçoivent une atteinte du fait d'une puissance quelconque.» Ces paroles répondaient admirablement au texte même de la convention: «Le gouvernement de la République déclare qu'il n'a pas l'intention de changer l'état politique du Maroc (art. 3)... Les deux gouvernements, également attachés au principe de la liberté commerciale tant en Égypte qu'au Maroc, déclarent qu'ils ne s'y prêteront à aucune inégalité, pas plus dans l'établissement de droits de douane ou autres taxes que dans l'établissement des tarifs de transport parchemin de fer (art. 4).» Depuis un an, rien dans la convention n'a été modifié; rien non plus n'a fait croire à une modification de la politique allemande au Maroc. Et c'est précisément ce que semble avoir voulu signifier Guillaume II lui-même, lorsque, peu de jours avant son départ, il allait dîner chez notre ambassadeur à Berlin, lui annonçait son escale de Tanger et parlait avec lui du Maroc. A Brême, il ajoutait, dans un discours: «L'empire allemand doit jouir de la plus absolue confiance de tous, comme un voisin tranquille, loyal et pacifique.»

Il est donc permis de croire, selon l'expression hardie d'un journaliste allemand, que «cette petite tempête diplomatique dans un verre d'eau sera bientôt calmée par l'huile de la bonne volonté». Rien ne nous interdit, pour l'heure, de ne voir dans la visite de Tanger qu'un nouveau caprice impérial. Caprice dangereux, d'ailleurs, et regrettable; car les Marocains--j'entends ceux qui ont intérêt à perpétuer dans leur pays l'insécurité et le trouble--vont en tirer grandement parti. La réception, le 31 mars, sera grandiose. Le sultan envoie au-devant de l'empereur son grand-oncle Moulaï Abd el Malek, accompagné des secrétaires du grand vizir et du ministre des affaires étrangères. Les routes et les rues que suivra le cortège sont réparées à grands frais; le palais du sultan, dans la kasbah, est restauré et luxueusement décoré. Les fêtes seront brillantes. Les adversaires de l'influence française ne cachent pas leur joie.

Et cependant, le 27 mars, à Tanger même, sur la place du Petit-Sokko, M. Harris, le correspondant du Times, était victime d'une tentative d'assassinat... L'oeuvre de police et de civilisation entreprise par la France apparaît chaque jour plus urgente. G. R.


L'hôtel Timeo, à Taormina, loué par les souverains allemands pour la durée de leur séjour en Sicile. Phot. Properzio.


OMNIBUS D'AUJOURD'HUI
ET DE DEMAIN

Un tramway parisien. Gare d'Orléans-Place de la Nation.
Le relais comme au temps des diligences.

LES TRANSPORTS PARISIENS LES VÉHICULES D'AUJOURD'HUI;
LE VÉHICULE DE DEMAIN.

Les transports en commun de Paris et du département de la Seine subissent, depuis quelques années, une crise qui ne fait que s'aggraver avec le temps. Les conditions de la vie ont notablement changé depuis 1860, époque où la Compagnie générale des Omnibus a obtenu la concession dont elle jouit depuis près d'un demi-siècle. On veut maintenant aller vite et à bon compte, et «la vieille dame», comme on l'appelle à l'Hôtel de Ville, s'est tellement complu dans le souvenir de ses succès de jadis qu'il lui faudrait maintenant faire des enjambées folles pour rattraper le temps perdu.

Quand elle s'est réveillée de sa torpeur, elle s'est lancée dans des expériences coûteuses, ne répondant pas toujours au gré de ses désirs. Des tramways mécaniques, comme ceux de Saint-Augustin ou de Montrouge-Gare de l'Est, coûtent des sommes folles et sont si mal compris qu'ils perdent aux stations et aux arrêts tout le temps gagné pendant le parcours.

Ces efforts mal proportionnés ont empêché la Compagnie de renouveler son matériel sur d'autres parcours. Comment admettre qu'en 1906 les Parisiens qui prennent la ligne d'Auteuil-Saint-Sulpice ou celle de la Gare d'Orléans-Place de la Nation en soient réduits à se servir des véhicules que nous représentons ici et dont la plus modeste sous-préfecture ne voudrait pas.


                                        Chevaux de renfort.

Nous avons pris le premier de ces tramways au moment où, sa course finie à très petit trot, son conducteur le fait tourner pour le remettre dans le sens de sa nouvelle direction.

Le côté primitif de l'opération, la lenteur avec laquelle elle s'exécute et surtout l'attitude lamentablement éreintée de l'infortuné cheval constituent vraiment un document curieux au seuil du vingtième siècle.

Quant au tramway de la gare d'Orléans, c'est le dernier cri de la malpropreté et de l'incommodité. Il part toutes les heures; mais, avec les fringants coursiers qu'il possède, on ne sait trop quand on arrive. Aussi ses dix places de plate-forme et ses douze places d'intérieur sont-elles encore trop nombreuses pour les amateurs.

Sur d'autres lignes, comme Montreuil-Châtelet, on change les chevaux en cours de route. Les employés procèdent sûrement mais lentement à cette opération compliquée, bien convaincus que le public n'a qu'à attendre leur bon plaisir. Les compagnies plus jeunes de tramways de pénétration n'ont pas su mieux s'y prendre. Elles aussi ont fait, sur certaines lignes, des frais exagérés, allant souvent à rencontre du but proposé; sur les autres, il leur a fallu laisser subsister l'ancien matériel.

Chacun sait le supplice qui attend les voyageurs du groupe des tramways du Châtelet dans la longue montée de l'avenue des Gobelins. Les lourds véhicules vont désespérément au pas et le conducteur, qui marche pour se dégourdir les jambes, est souvent obligé de ralentir son allure pour permettre à ses rosses éreintées de le suivre.

La Ville, le département de la Seine, le gouvernement même se sont inquiétés de l'insuffisance réelle et de l'incommodité de la plupart de ces moyens de transport. Une grande commission extraparlementaire a été nommée qui a pour but d'étudier un projet de réorganisation complète, un plan d'ensemble visant à la fois les parcours, les types des voitures, le prix des places, les moyens de traction. La Compagnie générale des Omnibus, la plus intéressée dans l'affaire puisqu'elle possède 85 lignes d'omnibus et de tramways, transportant chaque année 250 millions de voyageurs, s'est émue à l'annonce de ces études. Elle a voulu frapper tout de suite un grand coup, et peut-être la fin prochaine de sa concession, en 1910, et le désir de la voir renouveler ne sont-ils pas étrangers à cet empressement, d'ailleurs louable. Quoi qu'il en soit, elle a l'intention d'installer, sur quelques-unes de ses lignes, surtout celles qui comportent de longues montées, des omnibus automobiles.

Le tramway à unique cheval.
Rue des Martyrs: «... Trois forts chevaux tiraient un coche...»


              L'omnibus automobile de demain, actuellement
                                   en construction.

Les choses sont très avancées et la maison Serpollet est en train de construire le type d'omnibus automobile dont nous donnons le dessin. D'ici quatre ou cinq mois, cet omnibus modèle sera mis en circulation et, après expériences, on décidera s'il y a lieu de construire des types semblables ou d'y apporter des modifications.

La ligne choisie' pour ces expériences est, paraît-il, la ligne Pigalle-Halle aux Vins, à cause de l'interminable montée de la rue des Martyrs.

Le châssis établi par M. Léon Serpollet permet d'utiliser les caisses des omnibus actuels. L'omnibus automobile, qui serait à vapeur, pourrait monter les côtes les plus raides à une vitesse de 18 kilomètres à l'heure. Il serait ravitaillé pour 120 kilomètres de parcours et dépenserait au maximum 15 francs pour transporter 120 voyageurs.
Paul Delany.



L'allocution de M. le chanoine Dumont.--Phot. Raffaele. Mme Camille du Gast. M. le chanoine Dumont bénit la "Turquoise".

Le comte Balny d'Avricourt, représentant le parrain, le prince de Monaco, brise une bouteille de Champagne sur l'étrave de la "Turquoise".
Mme du Gast et le comte Balny d'Avricourt, envoyé extraordinaire du prince de Monaco.

Mme du Gast en costume de bateau.
Mme du Gast à la barre de la "Turquoise".

LE BAPTÊME DU CANOT AUTOMOBILE DE Mme DU GAST

Mme du Gast, sportswoman bien connue, qui a conduit avec succès des voitures dans plusieurs grandes épreuves automobiles sur route, vient de se faire construire un autocanot pour participer aux prochaines courses de Monaco. Ce canot a été lancé et baptisé le 24 mars au port de la Société nautique de la Basse-Seine, à Courbevoie, en présence d'une nombreuse et élégante assistance.



LE JAPON EN FLEURS: UN CHAMP D'IRIS.



LE JAPON EN FLEURS: SOUS LES GLYCINES.


LE CONCOURS AGRICOLE A LA GALERIE DES MACHINES


Débarquement de moutons.


Quatre porchers pour un seul cochon.


Le bain de pieds du boeuf gras.


La toilette avant la visite du jury.



(Agrandissement)
LE CROISEUR CUIRASSÉ JAPONAIS «YAKUMO» EN RÉPARATIONS A NAGASAKI
D'après un document japonais.
Le croiseur cuirassé «Yakumo», de 9.850 tonneaux, mesure 124 mètres de longueur; son tirant d'eau est de 7 m. 30; il a été lancé à Stettin en 1899.



La rade de Port-Arthur: effet de neige.


Comment s'est effectuée, sans aucune pompe militaire, l'entrée des Japonais dans Port-Arthur.


Une batterie russe dévastée par un obus japonais.--Phot. Emerson. La Banque russo-chinoise à la fin du siège.

QUELQUES ASPECTS ACTUELS DE PORT-ARTHUR



UNE SOIRÉE AU SOUS-SECRÉTARIAT DES BEAUX-ARTS, RUE DE VALOIS.
--Phot. Paul Boyer.

En prenant possession du sous-secrétariat des Beaux-Arts, M. Dujardin-Beaumetz a tenu non seulement à montrer tout de suite l'esprit d'initiative, l'activité qu'il entendait apporter dans l'exercice de sa haute fonction, mais encore à donner des gages de cette sociabilité qui lui vaut d'être cité parmi nos hommes politiques tes plus aimables et les plus accueillants. Un de ses premiers soins a été de faire rafraîchir et aménager les somptueux salons de la rue de Valois, afin d'y organiser des réceptions hebdomadaires qui ont été immédiatement très courues du Tout-Paris artistique et littéraire. La soirée de samedi dernier fut réussie à souhait: nombreuse et brillante assistance et beau programme comprenant notamment le premier acte de Lakmé, interprété par Mme Vallandri, Delvoye, Porno, etc. et M. Clément, de l'Opéra-comique.


S. M. la reine Alexandre d'Angleterre. S. M. la reine Amélie de Portugal. S. M. la reine douanière Maria-Pia de Portugal.
TROIS REINES
Photographie prise par le correspondant de l'Illustration, M. Benoliel, après le déjeuner en l'honneur de la reine d'Angleterre offert au palais de Cintra par la reine Maria-Pia, mère du roi Carlos de Portugal.



Smith.                                         Albert Almond.                               William Smith.


Arthur Rea.                               John Nixon.

l'épilogue d'un incident international--Physionomies des victimes de la canonnade de Hull après le versement de l'indemnité russe.

On vient de verser aux marins qui furent victimes de la canonnade des Russes, sur le Dogger-Bank, les indemnités qui leur ont été accordées. Un photographe s'est trouvé là, fort à point pour voir, comme on dit vulgairement, la tête que faisaient les marins du Crâne sous cette pluie d'or. Le second, William Smith, a touché 50.000 francs; les quatre matelots: John Nixon, Arthur Rea, Albert Almond et Smith, respectivement 12.500, 10.000. 7.500 et 6.250 francs. Tous étaient venus endimanchés comme à la noce, et, si Rea et Smith demeurèrent assez flegmatiques devant l'objectif, en revanche, un franc sourire illuminait les figures des trois autres.


Documents et Informations

La lecture des livres étrangers au Japon.



Il est fort intéressant de savoir si les Japonais sont curieux de la littérature des pays étrangers et dans quelles proportions les livres étrangers concourent à leur éducation.

Un récent rapport de M. Harmand, notre ministre plénipotentiaire à Tokio, nous apporte des documents capables de nous donner sur ce point d'importants renseignements.

Nous y voyons tout d'abord qu'en 1901, les livres étrangers les plus lus au Japon étaient les livres allemands; puis venaient les livres anglais, les livres américains, les livres chinois et les livres français. Mais, en réalité, les livres français étaient huit fois moins lus que les livres allemands.

Deux ans après, en 1903 quelques changements s'étaient produits: les livres allemands ont un peu moins de vogue; mais les livres anglais ont un succès immense: ils sont quatre fois plus demandés que les précédents. Les livres américains gagnent un peu. Par contre, les livres chinois sont délaissés et les livres français sont un peu en hausse.

Toutefois, en proportion réelle, les livres français sont vingt fois moins demandés que les livres anglais.

D'après M. Harmand, les livres importés de France sont pour la plupart des ouvrages de droit et des romans. Les livres de science proviennent d'Allemagne, d'Angleterre et des États-Unis.

Une explosion d'acétylène.



On ne saurait trop recommander la prudence la plus méticuleuse et la plus continue dans la manipulation et l'usage des appareils à acétylène. Ce mode d'éclairage, qui rend des services si sérieux, si incontestables, dans les localités dépourvues d'usine à gaz, est dangereux, moins par ses pouvoirs asphyxiants que par ses risques d'explosion, au moment de la fermeture ou de l'ouverture des récipients.


Une maison éventrée par une explosion d'acétylène à Pierrefeu (Var).--Phot. Lebègue.

C'est ainsi qu'il y a trois ans environ, un appareil à acétylène, explosant dans une cave d'un hôlel-restaurant d'Aix-en-Othe (Aube), éventra le plancher du rez-de-chaussée, tua la jeune femme du restaurateur, M. Trottier, et blessa plusieurs personnes. Une explosion plus terrible encore vient de se produire, il y a quelques jours, dans la commune de Pierrefeu (Var), au café de l'Europe. Vers 8 heures et demie du soir, de nombreux clients se trouvaient dans l'établissement, lorsque, tout à coup, une détonation formidable se fit entendre. Les murailles s'écroulèrent, les plafonds et les planchers s'effondrèrent, ensevelissant et tuant les propriétaires de l'établissement, M. et Mme Camoin, blessant plus ou moins grièvement les consommateurs présents.

Nos photographies donnent une juste idée de la violence inouïe de cette explosion.

Un nouveau traitement du rhume de cerveau.



Il existe mille et une méthodes de traitement du rhume du cerveau, ce qui démontre clairement qu'il n'y en a pas une seule de bonne. Il n'est aucun de nous qui n'ait essayé de plusieurs de celles-ci et qui n'ait éprouvé leur inefficacité. Aussi croyons-nous devoir signaler le mille deuxième procédé imaginé par le professeur Henle, de Breslau.

Il est fort simple d'ailleurs. Cela consiste, quand on sent commencer un rhume de cerveau, à s'aller pendre, ou à peu près; il ne faut pas aller jusqu'au bout de la pendaison.

Pour parler sérieusement, la méthode de M. Henle consiste à enserrer légèrement le cou avec un tube en caoutchouc que l'on attache après l'avoir serré de telle manière qu'il produise une turgescence manifeste des veines de la face. La face doit être un peu gonflée et rouge. Le tube de caoutchouc a pour effet de ralentir la circulation veineuse de la tête. Il doit rester deux ou trois heures en place et, pendant qu'il opère, on sent diminuer et disparaître les sensations de picotement nasal et l'écoulement. Si le rhume paraissait vouloir revenir, on aurait de nouveau recours au caoutchouc: il est rare qu'il faille plus de deux séances coup sur coup pour empêcher un rhume de s'installer. Le remède, on le voit, est simple; il serait très efficace d'après M. Henle, quand on a soin de l'employer à temps, c'est-à-dire dès la première menace d'un rhume.

Prévention de la maladie des cidres.



Dans la fabrication ordinaire du cidre, le moût, obtenu par pression ou par diffusion, est abandonné à la fermentation sans aucune addition de levure, de sorte que l'on n'est pas maître de cette fermentation, qui marche tantôt bien, tantôt mal, et fournit des cidres de qualité vraiment médiocre.

Le ferment qui agit dans ces conditions est celui qui se trouve répandu sur la pelure des pommes.

Or, si, avant de broyer les pommes, on les lave dans de l'eau formulée à 8/1000 et qu'on enlève ce liquide par un second lavage dans l'eau pure, le broyage et le pressurage étant faits ensuite avec des appareils préalablement lavés avec la même solution à 4/1000 les moûts ainsi obtenus ne fermentent plus. Ils ont été stérilisés par la soustraction des ferments de la pelure.

Ces moûts stériles présentent deux grands avantages: d'abord, ils peuvent voyager; des échantillons ont subi avec succès le voyage de Rennes à Buenos-Ayres, aller et retour; les traces de formol qu'ils renferment disparaissent au bout de quelques jours. D'autre part, ils peuvent être ensemencés avec des levures de choix, connues pour la bonne qualité des boissons qu'elles produisent.

Cette application directe des méthodes pastoriennes au cidre est duc à M. Perrier; elle mérite d'être connue. Le cidre est une boisson assez répandue pour qu'on se préoccupe d'assurer sa qualité et de lutter contre ses maladies, comme on a appris à le faire contre les maladies des vins et de la bière.

La vogue du pois chiche.



Le pois chiche semble jouir présentement d'une faveur qu'il n'a jamais connue. La production de pois chiches en France représente une valeur de 12 ou 13 millions de francs. Jusqu'ici, l'exportation était assez faible; mais, en 1904, elle s'est considérablement relevée.

L'importation, par contre, est importante. En 1904, pour neuf mois seulement, elle a représenté plus de 10 millions de francs. Les pois chiches non indigènes viennent du Maroc, de l'Algérie, de la Turquie et aussi des Indes. Mais les pois chiches des Indes ne s'offrent qu'au bétail: les autres sont réservés à l'homme.

Dans le midi de la France, la consommation de pois chiches est en croissance évidente; il s'en consomme en Italie aussi, et depuis longtemps les Espagnols sont particulièrement friands de ce produit. Mais la concurrence s'en mêle; d'autres amateurs surgissent. Il faut espérer toutefois qu'il n'y aura pas de «crise des pois chiches» et que cet excellent légume restera, comme maintenant, abordable.

La criminalité en France.



Le rapport sur l'administration de la justice criminelle en France, qui vient d'être publié, concerne l'année 1902.

On y lit que le nombre total des affaires criminelles soumises au jury, en 1902, est descendu à 2.024, après avoir été de 2.524 en 1899, de 2.283 en 1900 et de 2.103 en 1901.

Dans ce chiffre, la proportion des crimes contre les personnes est de 51% et celle des crimes contre les propriétés est de 49%.

Si l'on considère la période quinquennale 1891-1895, on voit qu'en cinq ans, la diminution du nombre des crimes a été de 29%, se partageant ainsi qu'il suit: 35%pour les crimes contre les biens et 27% pour les crimes contre les personnes.

En 1902, la proportion des accusés, selon le sexe, a été la suivante: 86 hommes et 14 femmes sur 100 accusés; selon l'état civil, 62 célibataires, 32 mariés et 6 veufs ou divorcés.

Abstraction faite des individus qui n'ont pas de profession, c'est la classe des accusés occupés à des travaux de manutention et de transports journaliers urbains pour la plupart qui, dans ses rapports avec la catégorie correspondante d'habitants, présente la proportion la plus forte (167 sur 100.000).

Au dernier degré de l'échelle criminelle se placent l'agriculture et les services publics (8 et 7 sur 100.000).


Mouvement littéraire

1815, tome III, par Henry Houssaye (Perrin, 7 fr. 50 et 3 fr. 50)--L'Armée moderne et les États-majors, par Pierre Baudin (Flammarion, 3 fr. 50).

1815.



Le tome III de M. Henry Houssaye commence après Waterloo et comprend l'abdication, la rentrée de Louis XVIII et la Terreur blanche. Que rencontra Napoléon revenant à Paris le 20 juin? L'hostilité de la Chambre des pairs et du Corps législatif où dominaient les libéraux comme La Fayette... Un seul moyen lui restait: user de son pouvoir de prorogation ou de dissolution des Chambres. Il pouvait faire un dix-huit brumaire légal et s'emparer de la dictature. C'est ce que lui conseillait Lucien. Mais l'esprit de décision de sa jeunesse et sa confiance ancienne en son étoile lui manquaient. En vain les fédérés, les soldats, les ouvriers criaient: Vive l'empereur! devant l'Elysée, il ne crut pas, dans la situation présente, pouvoir, sans les Chambres, réussir à chasser l'étranger; il craignait pareillement de déchaîner les foules révolutionnaires.

Trahi par Fouché, il abdique en faveur de son fils et se laisse persuader de quitter Paris pour s'établir, en attendant les événements, à la Malmaison (25 juin). De là il eut encore pu s'échapper; les tambours et les vivats des soldats qui passaient lui réveillaient toutes ses humeurs guerrières; il demanda à la commission exécutive, composée de cinq membres, avec Fouché comme président, de prendre le commandement des troupes, ce qui lui fut refusé. Fouché intriguait avec Vitrolles et, sans désirer nettement les Bourbons, se ménageait, dans la prévision de leur retour. Aussitôt après la nouvelle du désastre, Louis XVIII s'était acheminé de Gand vers la France. Après s'être arrêté à Cambrai, il en était parti le 30 juin sur l'avis de Wellington et, le 8 juillet, faisait son entrée solennelle dans Paris. En échange de ses bons offices, le général anglais lui imposa Talleyrand dont il savait l'habileté, et l'engagea à signer la nomination de Fouché comme ministre de la police. Etait-il possible de se passer de cet homme, un régicide, mais qui tenait dans ses mains le pouvoir et tous les fils de toutes les intrigues?

Que devient l'empereur, lequel, dans ces circonstances, est si loin de l'énergie première? Il se rend à Rochefort, afin de s'embarquer, sur une frégate française, pour les États-Unis. Mais, craignant la croisière ennemie et comptant sur la noblesse du peuple anglais, il se livre à Maitland, commandant du Bellérophon.

Rien de plus lamentable que l'état de la France pillée, incendiée et violée par les alliés. De plus, le parti vainqueur dresse ses listes de proscription. Des massacres illégaux comme, à Avignon, celui de Brune, dont le cadavre est traîné dans les rues et précipité dans le Rhône, se mêlent aux exécutions juridiques de La Bédoyère de Ney et des frères Faucher.

La Chambre introuvable élue, Fouché ne pouvait rester au pouvoir. On le nomme ministre de France à Dresde. Atteint, au commencement de 1816, par la loi contre les régicides relaps, il mourut en exil, l'an 1830.

Avec une belle éloquence toute littéraire et des documents précis et nombreux, M. Henry Houssaye nous a représenté ces mois si dramatiques. Il s'arrête à la chute de Talleyrand et au ministère du duc de Richelieu (25 septembre) qui signa les préliminaires de paix avec les quatre puissances.

L'Armée moderne et les États-majors. M. Pierre Baudin, dans ses études, examine l'ancienne armée avec le remplacement et les sept ans; l'armée de M. Thiers, sans homogénéité, prétend-il, avec les cinq ans et le volontariat; l'armée de trois ans avec les dispenses; enfin l'armée nouvelle avec la loi de deux ans et la suppression des dispenses. Pour le première fois, dit M. Baudin, nous aurons, comprenant toutes les forces intellectuelles, la nation armée en laquelle il se sent plein de confiance pour le: luttes futures ou pour maintenir fermement la paix autour de nos frontières.

Mais ce qu'il faut surtout considérer c'est l'état-major qui prend toutes les dispositions pour les guerres possibles. En Allemagne, il est peu nombreux et de sélection très étroite. Il ne comprend pas plus de deux cent quarante-huit officiers, débarrassés de tout formalisme administratif et de toute paperasserie. Chez nous, les officiers d'état-major sont au nombre colossal de sept cents--la Russie n'en compte que six cents--et s'occupent beaucoup trop d'administration minutieuse, en même temps qu'un certain nombre sont employés comme officiers d'ordonnance. Il les faudrait renfermer dans les questions techniques et stratégiques et dans les rapports sur les armées étrangères. C'est une critique sérieuse que fait de notre état-major, dont il reconnaît du reste les grandes qualités, M. Pierre Baudin. Dans son patriotisme, il le voudrait aussi parfait qu'il le désire. Son examen de l'état-major russe, composé de six cents officiers et son regard sur les causes des désastres en Extrême-Orient sont fort curieux. Au fond, je retrouve là ce que j'avais lu dans le livre d'un homme fort compétent, le général Zurlinden.

(Souvenirs de 1870).



A l'Académie de guerre de Saint-Nicolas, les commandants russes n'ont pas appris la guerre napoléonienne, la guerre d'attaque, toute en mouvement; ils font la guerre de position comme au dix-huitième siècle et comme nos généraux de 1870; ils cherchent les postes avantageux et y attendent l'ennemi. Or, avec les troupes de première ligne, il s'agit, dans les luttes modernes, de précipiter les chocs, d'aborder l'adversaire et de le culbuter, réservant, pour achever l'action ou pour les actions ultérieures, les troupes de seconde ou de troisième ligne, les réserves. Ce qui a réduit les Russes à la désastreuse guerre de position, ce n'est pas seulement leur enseignement militaire, mais leur peu de préparation. Pour l'agression et pour le mouvement, il ne faut pas des bandes ramassées rapidement, sans cohésion suffisante, mais une armée si une qu'elle ne paraisse que comme une seule force, et presque comme un seul homme. Dans les batailles, il est pareillement nécessaire de tout prévoir. Napoléon, d'avance, se rendait compte des forces et des projets de l'ennemi. Il semblait avoir assisté au conseil de ceux qui se tenaient en face de lui. Rien de plus lucide et de plus vigoureux que le livre militaire de M. Pierre Baudin.
E. Ledrain.



Ont paru:

La Vie à Paris, 1904, par Jules Claretie. 1 vol. in-18, Fasquelle, 3 fr. 50.--La Faillite du Bèce, par Poinsot et Normandy. 1 vol. in-18. Fasquelle, 3 fr. 50.--Suzannah, par Valentin Maudelstamm. 1 vol. in-18, Fasquelle, 3 Fr. 50.--Dans la paix des campagnes, par Maurice Montégut. 1 vol. in-18, Ollendorff, 3 fr. 50.--Réflexions sur l'escrime en général, par H. Hissaid. 1 vol., A. Maloine, 1 fr. 50.--Manuel de Ski, par le docteur W. Paulke, traduction par F. Achard. 1 vol., Berger-Levrault. 2 fr. 50.--La Marine russe dans la guerre russo-japonaise, par le capitaine M.-L. Clado, traduction par René Marchand. 1 vol. in-12, Berger-Levrault, 3 fr. 50.--L'Eupanto-phone, roman scientifique, par Henri Austroy. 1 vol in-18, Flammarion, 3 fr. 50.--La Cour et le règne de Paul 1er, par le comte Fedor Golovkine. 1 vol. in-8º, Plon-Nourrit et Cie. 7 fr. 50.--Micheline Brémont, par Félix Marigot. 1 vol., Victor Havard et Cie, 3 fr. 50.--Les Trois Demoiselles, par Georges de Peyrebrune. 1 vol., Félix Juven, 3 fr. 50.--Au Siam, journal de voyage de M. et de Mme Emile Jottrand. 1 vol. in-16, Plon-Nourrit Cie, 4 fr. La traduction des Sonnets portugais d'Elisabeth Browning, dont nous avons annoncé la publication chez Guilmoto, est de M. Fernand Henry, qui avait déjà traduit en vers français les Sonnets de Shakespeare et les Rubdiyât d'Omar Kheyyâm, le poète astronome de la Perse.


Les deux interprètes de Miss Helyett: Mlle Biana Duhamel
     qui créa le rôle en 1890 et Mlle Eve Lavallière qui
          vient de le reprendre en 1905.
--Phot. Paul Boyer.

LES THÉÂTRES

Refaire une Phèdre après Euripide et Racine peut sembler une tentative audacieuse. Pour réussir à souhait, le génie ne serait pas de trop. M. Jules Bois n'a peut-être que du talent; mais il en a beaucoup, et nous ne sachons personne autre que lui capable de mettre sur pied une tragédie telle que l'Hippolyte couronné que vient, après te théâtre d'Orange, de nous donner l'Odéon. Mlle Sergine, dans le rôle de Phèdre, figure avec une intensité d'expression peut-être excessive la victoire de «Venus tout entière à sa proie attachée». MM. Marquet et Dorival tiennent fort convenablement les rôles d'Hippolutos et de Theseus,--dénomination moderne de nos vieilles connaissances Hippolyte et Thésée.

Au Nouveau-Théâtre, Mme Eleonora Duse vient de faire une éclatante réapparition dans la Moglie di Claudio, traduction italienne de la Femme de Claude. On sait que cette pièce ne compte pas parmi les meilleures d'Alexandre Dumas fils; mais elle offre cet avantage de montrer une figure de femme qui résume en elle toutes les séductions et toutes les perfidies de son sexe. Dumas a dû créer ce type pendant un des accès de misogynie qui le tourmentaient, et aussi sans doute parce qu'il avait sous la main l'actrice capable d'incarner le personnage. Mme Desclée y fut effectivement admirable. On est d'accord à proclamer que Mme Duse ne l'est pas moins: elle joue merveilleusement le second acte qui renferme la scène capitale de l'ouvrage, celle où Césarine essaye de reconquérir son mari. D'excellents acteurs italiens donnent la réplique à l'illustre comédienne.

Ajoutons que la représentation de la Dame aux Camélias a été pour elle l'occasion d'un nouveau triomphe.

NOTRE SUPPLÉMENT MUSICAL

Daria.--La Petite Bohème.

Plusieurs de nos lecteurs, intéressés par les pages de l'Enfant-Roi et des Dragons de l'Impératrice que nous leur avons offertes dans notre supplément musical du 11 mars, nous ont demandé de leur donner aussi des fragments de deux des autres oeuvres musicales les plus récentes.

Nous en avons emprunté un à l'Opéra et l'autre, de nouveau, aux Variétés.

La presse a constaté unanimement le grand succès de Daria, le drame lyrique en deux actes de MM. Adolphe Aderer et Armand Ephraïm, musique de M. Georges Marty, succès qui s'est répété à chaque représentation de cette oeuvre. M. Delmas a fait preuve une fois de plus de son absolue maîtrise dans son interprétation du rôle d'Yvan; l'orchestre a été excellent sous la direction de M. Paul Vidal.
     AU CONCOURS HIPPIQUE DE PAU. --Un saut difficile.

Le charmant divertissement du 1er acte que nous publions aujourd'hui est tout entier construit avec une extrême habileté sur des thèmes populaires russes, il a obtenu jusqu'ici à chaque représentation les honneurs du bis.

On appréciera également le fragment que nous avons choisi de la Petite Bohème, opérette en trois actes de M. Paul Ferrier, musique de M. Henri Hirchmann. Cet ouvrage, qui vient d'être joué avec un très vif succès au théâtre des Variétés, est écrit avec élégance et esprit.

l'exposition des sports au champ de mars

On prépare, en ce moment, une Exposition internationale de l'Automobile et des Sports, qui doit avoir lieu en 1907. L'emplacement n'en est pas définitivement fixé, mais on incline à se déterminer pour le Champ de Mars qui réunit la majorité des suffrages. Seulement, un projet de M. Bouvard, directeur des services d'architecture de la Ville de Paris, a prévu, dès la clôture de la dernière Exposition universelle, une utilisation de cet admirable terrain qui agréait au Conseil municipal et qui semble contrarier, au premier abord, les projets des organisateurs de l'Exposition des Sports: réservant, au milieu du Champ de Mars, un large espace libre, converti en un élégant jardin public, le plan Bouvard aliénait les terrains en bordure, à charge pour les propriétaires de construire des maisons d'aspect pittoresque, entourées de jardinets ou de cours plantées.

Or, deux architectes qui ont fait leurs preuves, M. H. Deglane, l'un des constructeurs du Grand Palais des Champs-Elysées, et M. G. Lambert ont étudié, pour l'Exposition des Sports, un projet qui semble devoir tout concilier.

MM. Deglane et Lambert installent l'Exposition de 1907 dans une série de constructions édifiées soit au Trocadéro, soit dans la partie du Champ de Mars que M. Bouvard réserve pour créer un parc. Ces palais, qui englobent la galerie des Machines, seraient provisoires, pour la plupart, et disposés latéralement au Champ de Mars, précisément selon les dispositions générales du plan Bouvard. L'Exposition terminée, la galerie des Machines démolie, il demeurerait un palais en bordure de l'avenue de Suffren, ne coupant aucune des voies de communication qui réunissent, à travers le Champ de Mars, les VIIe et XVe arrondissements.

Le Champ de Mars après l'Exposition des Sports, d'après le projet de MM. Deglane et Lambert. L'Exposition des Sports de 1907 au Champ de Mars. Projet de MM. Deglane et Lambert.

Ce palais serait étudié comme construction non plus provisoire, mais destinée à demeurer pour abriter les grandes manifestations sportives, de plus en plus fréquentes et de plus en plus importantes. Il faut noter que ce palais occuperait la partie la moins facile à vendre du Champ de Mars; de cette façon, on pourrait, dès maintenant, adjuger les espaces dont M. Bouvard prévoyait l'aliénation. La perspective de l'Exposition des Sports leur donnerait même, sans doute, une plus-value. Si bien que le projet Deglane-Lambert semble la solution très élégante d'un problème épineux.


M. Barbey. Phot. Pirou, boul. Saint-Germain.


M. BARBEY

M. Barbey, sénateur du Tarn, ancien vice-président du Sénat, vient de mourir à l'âge de soixante-quatorze ans. Sorti de l'École navale, il avait fait les campagnes de Crimée et de Chine; à vingt-cinq ans, sa conduite au cours de l'expédition de Casamance (Sénégal) lui valait la croix; il était lieutenant de vaisseau lorsque, en 1863, il démissionna pour diriger, avec son père, à Mazamet, d'importantes filatures de laines.

Au début de la guerre de 1870, il reprit du service et commanda, pendant le siège, un des secteurs de Paris. Il siégeait au Luxembourg depuis 1882 et avait été ministre de la marine de 1887 à 1892, dans les cabinets Rouvier, Tirard et de Freycinet.


A TRAVERS LES LANDES


ENTRE ARCACHON ET BIARRITZ.--Les équipages de mules landaises sur tracé du futur boulevard automobile.

Un voyage d'exploration en France est chose peu commune. Le cas vient de se produire néanmoins et une caravane, composée d'une quarantaine de voyageurs, les uns à cheval, les autres en voitures traînées par des mules, vient de traverser les Landes, d'Arcachon à Biarritz, en longeant l'Océan.

Cette caravane avait pour mission de reconnaître le tracé d'une route qu'on a projeté de construire et qui sera spécialement réservée aux automobiles.

Ce sont deux sportsmen landais, MM. Bacon, maire de Labouheyre, et Vigneau, qui ont eu l'idée de créer cette route. Le «boulevard automobile Arcachon-Biarritz» reliera les deux grandes stations balnéaires par une voie longue de 135 kilomètres placée à 300 ou 400 mètres de l'Océan; la chaussée, large de 20 mètres, sera en béton armé et clôturée de chaque côté.

Actuellement il n'existe pas de route praticable dans les Landes et la caravane, partie d'Arcachon, marcha pendant quatre jours en se faufilant à travers la forêt de pins ou en parcourant de vastes dunes. Les mules, sans traits, simplement attelées par le cou à la flèche de la charrette au moyen d'un carcan rectangulaire de bois et de cuir, lentement tiraient les bros, petites voitures à roues larges faites pour aller sur le sable. Piétinant les hautes herbes ou les arbustes, les vigoureuses bêtes traînaient les bros qui passaient à tous moments sur le tronc d'un arbre abattu et retombaient ensuite dans une ornière profonde.

A la nuit, après douze heures de marche, la caravane avait ainsi franchi une soixantaine de kilomètres. Et, dans deux ans, c'est sur ce même sol, foulé hier par le sabot des mules se frayant un chemin à travers la brousse, que les automobiles silencieuses fileront à 120, 130 kilomètres à l'heure--et, qui sait, peut-être plus vite encore--sur une route droite, unie, sans obstacles, mais traversant cependant une région pittoresque où le calme des immenses forêts n'est troublé que par le bruit imposant des vagues de l'Océan s'écrasant sur le sable fin.



(Agrandissement)


NOUVELLES INVENTIONS

(Tous les articles publiés sous cette rubrique sont entièrement gratuits.

PORTE-PARAPLUIE «LE RAGA»

On sait qu'il est avantageux pour faire sécher son parapluie, de le placer la pointe en haut, la poignée en bas: on en augmente ainsi la durée et l'on évite une dépense appréciable, celle d'avoir à remplacer ou faire recouvrir souvent son parapluie.

Tel est le but atteint par le nouveau porte parapluie Raga, dont l'ingénieuse disposition permet de suspendre le parapluie automatiquement, par la pointe.

Tout le monde sait, en effet, que la première déchirure du parapluie se produit toujours à l'endroit de la petite cuvette inférieure, car c'est là que vient séjourner l'eau lorsqu'on place le parapluie la pointe en bas. Cette eau fait pourrir l'étoile et rouiller le fil métallique qui réunit les baleines.

D'autre part, en le faisant sécher ouvert, le parapluie tient beaucoup de place, et l'étoffe étant tendue se rétrécit en séchant et se déchire facilement.

Le dispositif qui maintient le parapluie est simple et commode; il consiste en une pièce métallique en forme de chimère capable d'osciller autour d'un axe et présentant une ouverture disposée horizontalement, au repos, pour permettre l'introduction facile de la pointe du parapluie. Cette dernière se trouve saisie entre deux galets de caoutchouc serrés élastiquement l'un contre l'autre, suffisamment pour maintenir le parapluie malgré son poids. Lorsqu'on abandonne le parapluie à lui-même après l'avoir introduit dans l'appareil, il prend, ainsi que l'appareil, la position verticale, comme l'indique notre gravure. Le grave inconvénient d'usure, par l'eau, du fond de l'étoffe se trouve ainsi évité ou tout au moins fortement atténué. Lorsqu'on retire le parapluie à soi en le prenant par le manche, l'appareil reprend de lui-même sa position initiale.

Le Raga possède d'autres avantages appréciables; il tient peu de place dans un vestibule où il peut être fixé à demeure; son aspect est décoratif et chaque parapluie se trouvant isolé, la recherche en est plus facile. Ajoutons que cet appareil se fixe simplement à l'aide de deux vis, partout où l'on peut le désirer.

Pour tous renseignements sur le porte-parapluie Raga, s'adresser à M. Ravoux-Garbil, 12, rue des Jardina, à Saint-Brieuc.


BOUCHON VERSEUR MESUREUR

Le nom même de ce petit ustensile indique le but visé par son inventeur. Il est, en effet, souvent utile de pouvoir verser rapidement et régulièrement des quantités données de liqueurs ou de médicaments, ou de savoir exactement le nombre de verres que l'on obtient dans un litre de liquide. Ajoutons que rien n'est plus aisé que de se servir de ce mesureur et que son prix est minime.

Nos figures représentent clairement le mode d'emploi de cet ustensile, qui se compose de deux tubes, fixés obliquement l'un sur l'autre, et d'une boule servant de capacité de mesure.

L'un des deux tubes, grâce à deux lames de ressort saillantes, s'ajuste à frottement dur dans des goulots de bouteille d'assez variable grosseur et transmet le liquide à la boule et au tube verseur contenant un piston métallique. Suivant les positions occupées par la bouteille, ce piston, par son propre poids, vient masquer ou démasquer le goulot de la bouteille ou l'orifice verseur.




Le fonctionnement est le suivant:

Pour mesurer une partie de liquide contenu dans la bouteille avant de le verser, il suffit de pencher la bouteille en avant (fig. 1); dans cette position le liquide s'écoule librement dans la boule.

Lorsqu'on juge que la quantité qui a pénétré dans la boule est suffisante, c'est-à-dire qu'elle est bien remplie, ce qui demande un temps d'arrêt d'une seconde, on tourne seulement le poignet (fig. 2); pendant ce double mouvement, le piston se déplace dans le cylindre, le liquide s'écoule instantanément par l'ouverture du piston tandis que le liquide qui se trouve dans la bouteille ne peut s'en échapper.

Le bouchon mesureur, en métal nickelé, est démontable: cylindre, boule et piston; toutes les pièces sont interchangeables.

Les boules se font en trois grandeurs: pour 20, 25 ou 30 verres au litre, ce dernier type étant le plus couramment employé. Cet ustensile peut rendre d'utiles services, en particulier dans les cafés, car il permet de supprimer le trop plein et de contrôler aisément le débit. Son prix est de 3 fr. 75 chez M. Moulin, 5, rue Curaterie, Nîmes.


NOTE DU TRANSCRIPTEUR:
Ce supplément ne nous a pas été fourni.