The Project Gutenberg eBook of L'idée de Dieu dans la philosophie religieuse de la Chine This ebook is for the use of anyone anywhere in the United States and most other parts of the world at no cost and with almost no restrictions whatsoever. You may copy it, give it away or re-use it under the terms of the Project Gutenberg License included with this ebook or online at www.gutenberg.org. If you are not located in the United States, you will have to check the laws of the country where you are located before using this eBook. Title: L'idée de Dieu dans la philosophie religieuse de la Chine Author: Lucien de Rosny Release date: January 11, 2010 [eBook #30930] Language: French Credits: Produced by Guillaume Doré and the Online Distributed Proofreading Team at http://www.pgdp.net (This file was produced from images generously made available by the Bibliothèque nationale de France (BnF/Gallica) at http://gallica.bnf.fr) *** START OF THE PROJECT GUTENBERG EBOOK L'IDÉE DE DIEU DANS LA PHILOSOPHIE RELIGIEUSE DE LA CHINE *** Produced by Guillaume Doré and the Online Distributed Proofreading Team at http://www.pgdp.net (This file was produced from images generously made available by the Bibliothèque nationale de France (BnF/Gallica) at http://gallica.bnf.fr) L'IDÉE DE DIEU DANS LA PHILOSOPHIE RELIGIEUSE DE LA CHINE CONFÉRENCE faite par M. LÉON DE ROSNY Salle du Musée Social, le jeudi 23 mars 1899 L'IDÉE DE DIEU DANS LA PHILOSOPHIE RELIGIEUSE DE LA CHINE Depuis plus d'un siècle, la question du déisme ou de l'athéisme de la Chine a été controversée par des écrivains et par des penseurs plus ou moins en état de réunir, de comprendre et d'apprécier les pièces du procès. Voltaire, par exemple, sans rien connaître des documents indigènes, reprochait avec aigreur aux «théologaux d'Occident» de soutenir que les Chinois étaient athées, et la déclaration de la Sorbonne en 1700, suivant laquelle serait réputé «hérétique» quiconque soutiendrait que l'Empereur de Chine croyait en Dieu, avait eu pour résultat de l'exaspérer. Du moment où il s'agissait de rendre un verdict aussi grave contre les Chinois, le moins eût été peut-être de bien s'expliquer sur ce qu'il faut entendre par un «athée». Un athée, suivant le paganisme grec ou romain, était un homme qui ne professait qu'un médiocre respect pour les habitants de l'Olympe où Jupiter lui-même et son épouse Junon ne jouissaient pas précisément du privilège de moeurs exemplaires. Au moyen âge, c'était quelqu'un qui ne prenait guère plus au sérieux les Élohim de la Bible que ces vieillards à barbe blanche dont les peintres lui montraient l'image comme une représentation de l'Être suprême. De nos jours, un athée--je ne parle pas de quelques gens qui s'affublent de ce titre dans le seul but de provoquer de coupables surexcitations religieuses--un athée, dis-je, n'est souvent rien autre chose qu'un sceptique, c'est-à-dire un chercheur qui ne trouve pas qu'on lui donne des preuves suffisantes pour admettre une individualité créatrice de notre globe, des autres boules du même genre qui roulent dans l'espace, et enfin de tout ce qui existe ou peut exister encore au delà de ce que nous connaissons ou de ce que nous croyons connaître. Eh bien! Lorsqu'on a soutenu que les Chinois étaient athées, on a oublié de nous dire auquel de ces trois genres d'athées ils appartenaient. On a fait plus mal encore: on a englobé une nation immense et ses diverses doctrines philosophiques en un tout qui n'a rien d'homogène, ainsi que nous nous proposons de le démontrer. Cependant, il est hors de conteste qu'il peut y avoir chez un peuple des athées et des déistes, sans qu'il soit permis pour cela de dire que ce peuple est lui-même athée ou déiste. Or, il me semble qu'il y a avantage à rattacher la question du déisme ou de l'athéisme des Chinois au moins à trois grandes manifestations religieuses ou philosophiques de l'Asie Orientale, savoir: la doctrine cosmogonique préconfucéiste qu'on peut appeler la théorie du _Taï-kih_,--l'enseignement moral et politique de Confucius et de son École,--et enfin la philosophie taoïste, dont on considère d'habitude Lao-tse comme le fondateur. I La doctrine cosmogonique, dont un des termes les plus importants est celui de _Taï-kih_[1], semble remonter aux origines mêmes de l'évolution intellectuelle des Chinois, ou du moins à l'époque où l'existence première de cette nation nous est signalée par l'histoire. Je suis enclin à émettre cette manière de voir, parce que plus j'étudie les oeuvres littéraires de la dynastie des Tcheou, c'est-à-dire les premiers monuments écrits que nous possédons dans des conditions sérieuses d'authenticité, plus j'arrive à me convaincre que la Chine avait longtemps vécu avant que de telles oeuvres aient pu se produire, et parce qu'un examen minutieux des textes de la grande époque de Confucius me conduit à reconnaître qu'ils sont la résultante de plusieurs systèmes cosmogoniques successifs très différents les uns des autres. Un sinologue qui s'est livré à l'étude de la philosophie n'admettra jamais que le premier des cinq livres dit canoniques, c'est-à-dire le _Yih-king_ par exemple, puisse appartenir à la même source d'idées que les autres _King_. Je crois donc que, pour découvrir la pensée qui s'attache au _Taï-kih_, il faut opérer une sorte de classement méthodique préalable des passages où nous en trouvons la mention dans les livres de l'antiquité chinoise. Toutefois, avant de tenter un pareil classement, il me semble utile de demander aux grands travaux lexicographiques de la Chine ce qu'il faut entendre philologiquement,--je dirais presque étymologiquement--par _Taï-kih_, c'est-à-dire «le Grand Kih», expression qui désigne, dans la théorie cosmogonique dont nous nous occupons en ce moment, la force ou puissance initiatrice de l'Univers. Les meilleurs lexiques de la Chine auxquels j'ai eu recours nous fournissent sur le mot _kih_ des interprétations très nombreuses, parfois assez divergentes, qui ne sont pas sans jeter une certaine somme de doute sur la valeur qu'il convient d'attribuer à ce mot, lorsqu'il figure dans les textes cosmogoniques de l'antiquité. On arrive même bientôt à croire, par la variété et par l'incohérence de ces explications, que non seulement il a varié de sens dans les diverses écoles antérieures à notre ère, mais qu'il a fini par perdre sa portée philosophique en pénétrant dans le langage des classes populaires. Établir ces variations de sens constituerait sans doute une oeuvre intéressante, mais elle exigerait de longues recherches dans une foule de livres non encore traduits qu'il serait peut-être prématuré d'entreprendre aujourd'hui, et il y a lieu de craindre que, même au prix de ces pénibles recherches, on ne puisse aboutir à un résultat précis et satisfaisant. Je me bornerai donc, pour l'instant, à signaler un choix d'interprétations que m'ont fournies les oeuvres lexicographiques les plus autorisées, interprétations que je m'efforcerai de rattacher aux différentes tentatives d'exégèse entreprises sur la définition du _Taï-kih_ par les penseurs chinois. Dans les textes où cette expression figure comme terme fondamental de l'idée cosmogonique, le mot _kih_ veut dire «le principe et la fin, la condition suprême[2]». C'est la Loi suprême «qui préside aux transformations[3] ou, en d'autres termes, la condition immuable qui résulte de la Justice fatale, intransigeante et ininfluençable». Joint au qualificatif _taï_ qui signifie «grand», il nous est donné comme la dénomination de l'Unité absolue et primordiale[4], antérieure à la séparation originelle des éléments chaotiques de l'univers[5]. Cette Unité absolue et primordiale, que nous verrons bientôt identifiée à un Ciel plus ou moins dépourvu de personnalité, est une force rationnelle (_Li_) qui représente «la Raison d'être du firmament, de la terre et de tous les êtres[6]». Puis l'idée cosmogonique se développant déjà d'une façon remarquable dans l'esprit de la race Jaune, à cette période très ancienne, le _taï-kih_ se trouve associé aux deux principes générateurs du Dualisme chinois, le _yin_ ou «principe femelle» et le _yang_ ou «principe mâle». La doctrine dualiste elle-même nous est présentée sous plusieurs formes qui prouvent les tâtonnemens des premiers philosophes de la Chine pour arriver à rendre intelligible leur système relatif à la création. De la sorte, à la place du principe mâle et du principe femelle, nous voyons mentionnés les _Leang-i_ ou «Deux I[7]», qui représentent les manifestations primordiales créatrices de la Raison initiatrice (_Li_), lorsque celle-ci devient active dans la Nature ou, en d'autres termes, se matérialise. Ces deux manifestations créatrices primordiales sont contraires l'une à l'autre; elles constituent, dans la pensée chinoise, deux conditions nécessaires à la production de la vie et du mouvement. Opposées de la sorte dans leur mode d'action, l'une représente le principe actif, l'autre le principe passif; mais ces deux principes sont eux-mêmes inhérents au _Taï-kih_, dont le principe mâle ou _yang_ dérive par son état d'activité et le principe femelle ou _yin_ par son état de repos[8]. Plus tard, le système se développe et le _Taï-kih_ devient multiple par son identification avec les _San Tsaï_ ou Trois Principes évolutifs de l'univers et par d'autres complications que je crois inutile de signaler pour résoudre le problème dont je m'occupe en ce moment. Je me bornerai à ajouter que lorsque les cosmogonistes chinois identifient le _Taï-kih_ au Ciel, ils n'accordent pas à celui-ci la puissance créatrice sans le concours des deux principes dualistes qui émanent de lui. «Le Ciel, disent-ils, seul ne peut produire ou créer, pas plus que le principe mâle ou le principe femelle isolément. Le concours des trois forces est nécessaire pour que la création devienne effective[9].» Pour en revenir à la question que je me propose d'étudier ici, les Chinois, qui comprennent de la sorte leur _Taï-kih_, sont-ils oui ou non des athées? Ils ne le sont pas pour ceux qui se refusent à attacher à l'idée de Dieu celle d'une individualité plus ou moins conçue à l'image de l'être humain et qui aurait créé le monde par un acte de son bon plaisir; ils le sont à coup sûr pour ceux qui admettent que Dieu est un personnage capable de prendre forme et même de parler, comme le Jehovah de la _Bible_, ou d'entendre les récriminations des hommes comme les Dieux d'une foule de cultes anciens et modernes. Tant qu'il demeure dans le domaine à peu près exclusif de la recherche philosophique, le _Taï-kih_ semble exempt de toute matérialisation, de tout anthropomorphisme; et, comme je l'ai dit, je suis porté à croire que cette manière d'en comprendre le caractère est celle qui remonte le plus haut dans ce qui nous est possible de découvrir des origines philosophiques et religieuses de la race Jaune. La matérialisation du _Taï-kih_ commence alors que nous voyons ce grand principe primordial identifié avec le Ciel[10]. On ne peut pas dire cependant que les Chinois, par cette identification, en soient arrivés dès l'abord à l'idée soit anthropomorphique, soit même individualiste de Dieu. Le Ciel, qu'ils nous donnent comme assimilé au _Taï-kih_, est quelque chose d'autre que le firmament: c'est une pure Loi directrice, qui, plus tard seulement, devient une personnalité. On nous explique bien les mots _Taï-kih_ par une formule qui signifie «l'air du Ciel»[11], si l'on fait seulement acte de traducteur sans s'être d'abord pénétré suffisamment du génie de la cosmogonie primitive de la Chine, mais qu'il faut expliquer par «émanation céleste», interprétation qui est d'ailleurs justifiée par cette autre qui veut dire «Vertu céleste»[12]. Et, dans ce cas encore, il faut prendre les plus grandes précautions pour ne pas dévoyer. Par «Vertu céleste», en effet, il ne faut pas comprendre les bons sentiments ou les actes généreux du Ciel[13], mais «la Vertu» dans le sens de «Caractère spécial», comme lorsqu'on dit «la vertu d'un principe, la vertu d'un médicament». J'insiste sur la nécessité de tenir compte de pareilles nuances dont les sinologues se sont malheureusement trop peu préoccupés lorsqu'ils ont traduit des textes philosophiques, cosmogoniques ou religieux. Faute d'y avoir prêté attention, ils ont fait dire à des écrits dignes de tout notre respect,--j'oserais peut-être ajouter, de notre admiration,-- des paroles incohérentes et même des insanités dont les anciens Chinois ne sauraient être rendus responsables à aucun titre. J'ai acquis de la sorte la conviction qu'en recourant aux sources originales, il était possible de suivre en quelque sorte pas à pas les transformations de la philosophie à laquelle appartient cette haute expression de _Taï-kih_. II L'apparition de Confucius est un événement gigantesque dans l'histoire de la civilisation chinoise. Ce grand moraliste, qui professait une doctrine essentiellement utilitaire, c'est-à-dire une doctrine qui se rapproche à bien des égards de ce que nous appelons aujourd'hui le Positivisme, Confucius, dis-je, avait jugé opportun, pour le succès de son oeuvre, de se présenter comme le restaurateur de la sagesse antique et de s'appuyer sur des documents qu'il attribuait aux âges primitifs de son pays. Ses déclarations à cet égard laissent beaucoup à désirer. Non seulement nous savons qu'il n'eut aucun scrupule d'altérer les textes offerts par lui à la vénération publique, alors que ces textes ne se prêtaient pas aux succès de ses théories politiques et sociales, mais il suffit de lire avec attention les _King_ ou livres Canoniques dont il est considéré comme l'éditeur, et les _Sse-chou_ qui renferment les échos de ses enseignements recueillis par ses disciples, pour se convaincre que son esprit était inapte à tout travail de spéculation intellectuelle et même d'exégèse et de critique. Il était à coup sûr un merveilleux observateur, et nul mieux que lui ne sut comprendre, ni à son époque, ni plus tard, ce qui répondait le mieux aux sentiments et aux aspirations de sa race. Son contemporain, Lao-tse, ne l'avait toutefois qu'en assez médiocre estime, et il n'eut pas de scrupule à le lui déclarer à lui-même. Que pouvait faire Confucius dans de telles conditions, alors qu'il se trouvait en présence d'une philosophie cosmogonique dont il n'était pas capable de saisir les concepts et dans laquelle il ne voyait, en tout cas, rien qui puisse servir sa nation au point de vue pratique, le seul qu'il était à même d'embrasser dans toute son étendue? La réponse nous la trouvons dans les livres primitifs de la Chine et, en attendant que nous les ayons compulsés avec le soin désirable, dans les grands et très remarquables travaux de philosophie publiés d'âge en âge par les écrivains chinois. Pour aboutir à son but, Confucius avait jugé à propos de faire accepter par ses compatriotes le culte de ce qu'il nomme le _Hiao_, mot que nous avons l'habitude de traduire par «Piété filiale», mais qui possède une signification bien autrement large dans les traités de morale et dans tout ce qui touche à l'édifice politique et intellectuel des Chinois, aussi bien de ceux des temps anciens que de ceux qui vivent encore de nos jours dans le plus vieil empire du monde. Faisant reposer sa doctrine sur la Piété Filiale, Confucius a établi comme une institution indispensable pour un peuple le Culte des Ancêtres. Il a su, de la sorte, faire vivre les hommes dans le respect du passé et n'avoir aucune ambition plus haute que celle de survivre par le souvenir chez leurs descendants. Dans nos pays civilisés, nous ambitionnons des honneurs pendant notre vie; les Chinois en ambitionnent même après leur mort, et les lois du Céleste-Empire permettent de conférer des titres, des grades, des décorations à des défunts comme récompense des services rendus par leur progéniture. Cette manière de donner satisfaction à l'orgueil humain nous fait sourire. Sur les bords du fleuve Jaune, on la prend au sérieux et l'on n'aurait garde de rien dire, de rien faire qui lui soit attentatoire. Si nous nous moquons des Chinois en cette circonstance, ils nous rendent bien la pareille, ne fût-ce que par le dédain qu'ils professent pour une foule de nos progrès matériels et de nos institutions politiques. Avec une telle manière de comprendre la vie, le célèbre moraliste de Lou ne voyait aucun avantage à s'occuper de la loi initiatrice représentée par le _Taï-kih_, et les raisonnements fondés sur les deux principes du Dualisme primitif lui semblaient pour le moins des spéculations infructueuses. Il avait toutefois des motifs pour ne pas le dire tout haut; nul doute ne subsiste à cet égard sur sa manière de voir. Ayant pris à coeur de concilier les intérêts du peuple et ceux du monarque, de proclamer hautement les prérogatives de celui-ci, tout en rendant les abus de son autocratie difficiles et même périlleux, il comprit combien il pouvait tirer parti pour dominer la masse d'une doctrine établissant l'existence d'autorités extra-terrestres. Ces autorités imaginaires, il en trouva d'abord la formule dans celle du Ciel immatériel de la philosophie antique; mais, dans les livres qui existaient de son temps, cette formule était exprimée en des termes fort au dessus de la compréhension des masses. Il chercha donc à la mettre à la portée du grand nombre. Le _Taï-kih_ fut en conséquence représenté comme «l'ancêtre de toutes les créatures»[14] et par suite comme le principe magnanime et généreux «qui a produit la vie» sur la terre[15]. L'idée de premier ancêtre des créatures devait conduire rapidement à celle qui avait pour effet de personnaliser la Loi suprême, c'est-à-dire à la mention de cet être supérieur appelé _Chang-ti_, expression que beaucoup de sinologues considèrent comme l'équivalent de notre mot «Dieu». Toutefois, à la même époque sans doute, cette dénomination en apparence monothéiste vint s'associer aux réminiscences populaires d'un polythéisme grossier dont quelques anciens livres, notamment le _Chang-haï King_, nous fait connaître l'existence dans la haute antiquité chinoise. Le _Chang-ti_ représente de la sorte «le grand prince ou chef de tous les génies»[16]. Ces génies, associés sans cesse aux _Koueï_, mot qu'on a quelquefois traduit par «démons», étaient très nombreux. On rendait aux uns et aux autres des hommages dans les sacrifices[17]. Puisque c'est surtout à propos de cette expression _Chang-ti_ qu'ont été engagées les grandes disputes au sujet du Déisme ou de l'Athéisme des Chinois, il ne me semble pas inutile de m'y arrêter un instant et de faire connaître les principales explications des lexicographes chinois sur son compte. Dans cette expression _Chang-ti_, il y a le mot _ti_ qui isolément est d'habitude traduit par «Empereur», et le mot _chang_ qui est un qualificatif signifiant «élevé», d'où «l'Empereur élevé». On a préféré traduire: «le suprême Empereur». Ce mot _ti_ signifie en outre «gouverner»[18]; c'est communément le titre que l'on donne au «prince»[19] et la dénomination honorifique de celui qui gouverne le monde[20]. A une époque reculée, c'est-à-dire à celle où il convient de faire remonter la rédaction des _King_ ou Livres canoniques, nous le trouvons déjà, avec son qualificatif _chang_ «suprême» assimilé au Ciel[21]. Par suite de certaines interprétations des lexicographes chinois les plus autorisés, il reste peu douteux qu'il s'agisse alors d'un Ciel idéal, distinct du Ciel matériel. Car si le mot _ti_ désigne «celui qui est arrivé par sa vertu à se mettre en accord avec le Ciel[22]», ou bien encore «celui qui par sa vertu, en s'identifiant au Ciel et à la Terre, se tient dans la rectitude et n'a point d'égoïsme»[23], on nous dit aussi qu'il exprime l'idée de «Génie Céleste»[24], c'est-à-dire quelque chose qu'on peut assimiler au Dieu du monothéisme sémitique, bien qu'une telle assimilation soit peut-être un peu excessive. Le _Chang-ti_, dans le _Chou-king_ ou Bible des Chinois[25], nous est bien présenté comme une divinité supérieure, mais cette divinité n'est pas seule l'objet du culte indigène: on lui associe d'autres puissances qu'on offre à la vénération de la foule, voire même les montagnes et les rivières, ainsi qu'un nombre indéterminé de génies. Et comme parmi ces objets de vénération, on mentionne les saisons, le froid et le chaud, le soleil, la lune, les étoiles et la sécheresse, on s'aperçoit bientôt combien il était difficile pour ces anciens cosmogonistes d'arriver à une notion abstraite de Dieu, détachée de toute assimilation avec le Ciel matériel et les phénomènes de l'atmosphère. Il me paraît toutefois peu contestable que, dès une haute antiquité, les Chinois ont admis l'existence d'une personnalité céleste gouvernant le monde et appelée _Chang-ti_; mais il me semble en même temps qu'il y avait là une croyance populaire qu'il faut distinguer de la théorie cosmogonique suivant laquelle ce _Chang-ti_ aurait été le Ciel initiateur[26] considéré comme la Loi ou la Cause primordiale de l'Univers[27]. Le _Yih-king_ ou «Livre traditionnel des Transformations» fait bien partie de la collection des ouvrages dits canoniques que Confucius se crut la mission de réunir et de transmettre à la postérité; mais l'esprit qui en a inspiré la composition est tellement différent de celui des autres _King_ qu'on a une tendance à l'en séparer complètement pour y voir un autre genre de manifestations philosophiques et morales de la Chine primitive. Or, dans ce livre étrange et sur lequel on a fondé les théories les plus bizarres, au point de vouloir lui attribuer une origine babylonienne[28], il est également fait mention du _ti_, et plusieurs sinologues autorisés, notamment le Rev. James Legge, n'ont pas hésité à y voir une mention de Dieu[29]. Le P. Gaubil et Medhurst, tout en adoptant la même manière de traduire, n'avaient cependant pu cacher au sujet du sens de ce mot une certaine hésitation[29]. S'il est vrai que le doute n'est plus guère possible à l'époque du philosophe Tchou-hi, qui définit le _ti_ par «seigneur et gouverneur du Ciel» et même au temps plus reculé de cinq siècles où vivait le célèbre Wang-pi (IIIe siècle de notre ère), il n'en est pas ainsi pour le siècle de Confucius et surtout pour les périodes qui ont précédé ce célèbre instituteur. Ces périodes, il est vrai, sont tellement obscures, on pourrait peut-être dire hypothétiques, qu'il est bien difficile de rien affirmer formellement au sujet de ce qui s'y passait; il est néanmoins aussi sûr que possible que l'éclosion des théories cosmogoniques auxquelles se rattachent les termes de _Taï-kih_ et de _Chang-ti_ sont de beaucoup antérieures à l'âge durant lequel vécurent les deux grands philosophes chinois Lao-tse et Confucius. L'obscurité profonde du _Yih-king_ permet malheureusement d'y trouver à peu près tout ce qu'on veut sur la cosmogonie. Il est même assez probable qu'il doit à cette obscurité le plus grand nombre de ses admirateurs. Parmi ceux-ci, il convient de citer Confucius qui, dans sa vieillesse, n'hésita pas à dire qu'il avait commis la faute de trop négliger son étude alors qu'il était jeune et qu'il ne cultivait plus d'autre ambition que celle de parvenir à le bien comprendre avant sa mort[30]. Je ne voudrais pas me prononcer d'une façon trop sévère, et encore moins en termes trop enthousiastes sur ce que peut valoir ce premier des cinq _King_, et cela pour un motif très sérieux, à savoir que, dans ma pensée, il n'a pas été jusqu'à ce jour étudié d'une façon satisfaisante, surtout au point de vue philosophique et religieux qui m'occupe en ce moment. Qu'il me suffise de soutenir qu'en tout cas l'idée d'un Dieu ou Principe invisible, immatériel et directeur de l'univers y est énoncée dans des termes suffisamment clairs pour qu'on ne puisse à aucun égard le considérer comme une oeuvre de source athéiste. III Il me reste, pour compléter cet aperçu rapide des idées chinoises relatives à la Loi directrice de l'Univers, à vous dire quelques mots de ce qu'a été cette conception dans la grande École chinoise du Taoïsme. La doctrine que représente le _Tao-teh King_ témoigne d'une puissance de pensée et de conception telle que je ne puis me résoudre à croire qu'elle ait été l'oeuvre d'un seul homme, d'un seul philosophe, dans un pays où le travail de nombreuses générations antérieures ne lui aurait pas préparé toutes les voies. J'admets comme une certitude l'existence du progrès, mais je sais que le progrès s'accomplit lentement et avec le concours indispensable d'un nombre considérable de collaborateurs dévoués, tenaces et intelligents. Lorsque je songe que Lao-tse a vécu six siècles avant notre ère et dans un milieu en apparence aussi peu favorable que le pays des anciens Chinois, j'éprouve un certain trouble pour indiquer la place réelle qu'il convient de lui affecter, dans le travail évolutif de l'idée religieuse chez les riverains du fleuve Jaune. Autant l'apparition de Confucius, à la même époque qui fut celle de Çàkya-mouni et de Pythagore[31], semble une résultante logique des faits qu'on nous rapporte sur les siècles antérieurs au sien, autant la présence dans cette même région d'un génie aussi pénétrant et aussi original que le fut Lao-tse me paraît difficile à comprendre avec les données que nous possédons jusqu'à présent sur l'état évolutif de la Chine antique. J'avais, en conséquence de cette considération, supposé à priori durant la première période de mes études sur le Taoïsme, l'existence en Chine d'une philosophie absolument distincte de l'enseignement moral et socialiste de Confucius, philosophie qui aurait vu le jour aux époques dites préhistoriques de la civilisation chinoise. De patientes recherches dans les textes originaux et dans les écrits de plusieurs sinologues autorisés ont eu pour résultat de me convaincre que mon hypothèse relative aux origines du Céleste-Empire répondait à une réalité historique. Je n'ai donc plus aucune hésitation à soutenir désormais que la philosophie taoïste a été la conséquence d'un labeur intellectuel dont les premières manifestations se perdent dans la nuit des temps ou ont été du moins fort antérieures au VIe siècle avant notre ère. De longs développements et l'énumération d'une foule de petits faits qui ne peuvent guère intéresser que les spécialistes seraient nécessaires pour établir la doctrine que je professe aujourd'hui sur les débuts du Taoïsme et sur les efforts de pensée qu'il a fallu accomplir en Chine pour rendre possible l'apparition dans ce pays d'un homme de la trempe de Lao-tse. On me pardonnera de ne pas entreprendre un tel déploiement d'érudition dans une conférence où je ne me suis proposé en somme qu'un seul but, celui de démontrer que non seulement les Chinois croyaient en Dieu, mais en plus qu'ils avaient énoncé sur l'existence de Dieu des idées d'une remarquable portée et dignes à tous égards de la respectueuse sollicitude des chercheurs du monde contemporain. Je ne m'occuperai donc point ici des précurseurs de Lao-tse sur lesquels on commence seulement à réunir quelques indices qui ont besoin d'être examinés de très près et discutés avec connaissance de cause avant qu'on soit en droit d'en faire un usage sérieux pour l'histoire de la philosophie chinoise. Je me bornerai à parler du Taoïsme tel qu'il résulte de l'étude de son livre canonique, le _Tao-teh King_. Cet ouvrage d'une valeur considérable, mais dont l'intelligence présente d'énormes difficultés, a été déjà l'objet de plusieurs traductions en langues européennes. Toutefois, si le proverbe _traductore traditore_ est souvent vrai, je n'hésite pas à déclarer qu'il l'est d'une façon tout à fait exceptionnelle lorsqu'on l'applique à l'oeuvre de Lao-tse. Malgré le profond respect que je professe pour les connaissances sinologiques de mon ancien maître Stanislas Julien, l'un des deux premiers traducteurs du _Tao-teh King_[32], j'ai le devoir de dire qu'il n'a pas compris les parties essentielles de la grande oeuvre de l'illustre contemporain de Confucius, de cet homme extraordinaire qu'un savant orientaliste anglais, M. Chalmers, n'a pas hésité à placer au premier rang des philosophes de la Chine antique[33]. Pauthier, le concurrent malheureux de Stanislas Julien, qui avait traduit quelques années avant celui-ci le livre fondamental du Taoïsme[34], connaissait insuffisamment la langue chinoise, mais il n'était pas à beaucoup près un homme sans talent, et en maintes circonstances il suppléa par son esprit éclairé à l'insuffisance de son savoir, au point de vue philologique. S'il n'a pas compris lui non plus dans son ensemble l'oeuvre de Lao-tse, il a su du moins lui donner une apparence acceptable en certains endroits dont l'énoncé semble révoltant dans la version de son savant rival. De graves divergences ont déjà été formulées sur les essais de ces deux érudits[35]. Toutefois la valeur exceptionnelle du texte antique qu'ils avaient eu l'intention de faire connaître au monde européen et qui est encore aujourd'hui assez médiocrement connu, mérite que ces critiques soient reprises en sous-oeuvre et même longtemps discutées avant qu'une traduction acceptable puisse enfin être mise au jour. Un orientaliste de mérite, Abel-Rémusat, maître de Stanislas Julien, s'était lui aussi occupé du _Tao-teh King_[36] sur lequel les travaux des anciens missionnaires de Péking[37] avaient appelé tout particulièrement son attention. Faute de pouvoir lire et comprendre les nombreux commentaires composés d'âge en âge par les Chinois pour faciliter l'intelligence de ce livre, il s'était trouvé hors d'état d'y découvrir les importantes idées qu'il renferme. Il se livra donc à des observations enfantines sur quelques passages où l'on avait cru découvrir des rapports entre l'enseignement taoïste et la religion juive. Parmi ces observations, l'une d'elles provoqua avec raison les remontrances de son élève Stanislas Julien, qui en fit justice dans la préface de son livre. Je veux parler de l'identification du nom de _Jehovah_ avec trois particules contenues dans un des chapitres du _king_ ou texte traditionnel de Lao-tse[38]. On me pardonnera, je l'espère, si j'ai cru utile de donner ici ces explications presque exclusivement bibliographiques, avant de parler des passages du _Tao-teh King_ qui nous permettent de discuter la question de savoir si les adeptes de la doctrine du _Tao_ doivent être considérés comme des athées, ou bien comme des déistes. Dans ce dernier cas, dont j'ai la prétention d'établir l'exactitude, il y aura lieu de déterminer à quel genre de déistes appartenait Lao-tse. J'insiste sur cette déclaration, car je tiens essentiellement à soutenir que les prétendus sectateurs de ce puissant génie n'ont plus que quelques rares rapports logomachiques avec l'enseignement de celui qu'ils appellent leur Maître. C'est pour ce motif que j'ai jugé indispensable de faire usage du mot _Taosseisme_ pour désigner la religion de ces derniers et ne pas la confondre avec la philosophie originale et si remarquable du _Tao_ que je nomme _Taoïsme_. La question que je désire discuter dépend du sens qu'il convient d'attribuer au _Tao_, expression fondamentale sur laquelle repose la doctrine de Lao-tse. J'ai consacré à l'examen de ce mot un chapitre entier d'un ouvrage que j'ai publié sur cette antique doctrine de la race Jaune[39]. Je résumerai mes recherches aussi brièvement que possible pour arriver aux conclusions que j'ai en vue, sans abuser outre mesure de votre bienveillante attention. Si l'on cherche le sens de ce mot _Tao_ dans les dictionnaires chinois composés pour l'usage des Européens, on trouve qu'il en a plusieurs et de fort distincts, ce qui en rend l'interprétation difficile lorsqu'il s'agit de son emploi dans le langage philosophique. Les principaux de ces sens,--ou du moins les plus habituels, sont, «route», «parler» et «doctrine». Stanislas Julien a cru devoir choisir celui de «voie»[40]. Pauthier s'est beaucoup plus rapproché de la vérité en employant celui de «Raison primordiale» ou «Principe suprême»[41]. La signification en langue vulgaire de «parler», l'a fait identifier par quelques auteurs au [Grec: logos] des Néo-platoniciens et celle de «lumière» à la _Bôdhi_ ou «Connaissance absolue» des Bouddhistes. Plusieurs orientalistes[42], et je suis du nombre, n'ont pas hésité à le rendre par «Dieu», dans l'espoir que cette traduction serait, tout bien calculé, moins obscure que celle qui résulterait de longs considérants aussi difficiles à comprendre que le mot «Dieu» lui-même. On doit néanmoins tenir compte, mais avec de grandes réserves, de l'explication suivant laquelle le Tao serait la Raison éternelle, antérieure à Dieu, et sans laquelle Dieu n'aurait jamais pu exister[43]. J'aurais sans doute des remarques intéressantes à vous faire sur cette singulière explication qui révoltera non sans motif plus d'un penseur; mais ces remarques m'entraîneraient trop loin et je dois revenir, sans plus de parenthèses, à la formule de l'idée de Dieu, suivant la doctrine de Lao-tse, telle qu'elle s'est présentée à mon esprit après plusieurs années d'étude du _Tao-teh King_ et des travaux de ses commentateurs les plus autorisés. Faute de pouvoir vous présenter aujourd'hui mes idées avec tous les développements voulus, je me bornerai à vous dire que je ne puis pas admettre que le _Tao_ de Lao-tse soit quelque chose d'autre que Dieu et qui ait précédé la manifestation de la divinité. Seulement il s'applique à la conception d'un Dieu d'une nature non seulement immatérielle, mais indéfinissable. Lao-tse s'exprime à cet égard de la façon la plus formelle: «Le Dieu qu'on peut définir, dit-il, n'est pas le Dieu absolu (en chinois: _Tao ko tao, feï Tchang Tao_.)» En d'autres termes, nous ne pouvons avoir qu'une simple intuition du Dieu véritable. L'enseignement bouddhique des écoles les plus avancées, en adoptant la même manière de voir au sujet de Dieu, ajoute toutefois que cette intuition peut être de plus en plus complète, de plus en plus suggestive, suivant la mesure dans laquelle nous parvenons par nos efforts à anéantir en nous le sentiment égoïste, le sentiment de notre personnalité, pour nous associer et nous confondre avec le Grand-Tout. Sans la crainte d'abuser outre mesure de votre bienveillante attention, je vous aurais entretenu d'un autre terme fondamental du Taoïsme, à savoir de la _Teh_ dont le nom figure dans le titre du _Tao-teh King_ de Lao-tse, titre que Stanislas Julien, comme je l'ai dit, a rendu par «le Livre de la Voie et de la Vertu», interprétation que je me refuse absolument à accepter. Je vous ai fourni tout à l'heure quelques explications sommaires au sujet du mot _Tao_. Le mot _King_, qu'on traduit d'habitude par «Livre sacré» signifie, simplement «un écrit traditionnel». Quant au mot _Teh_, il veut bien dire «vertu» dans le langage ordinaire, mais dans celui de la philosophie taoïste, il a une bien autre portée: il y exprime l'élément muable, qui est la seconde caractéristique de Dieu, dont la première est l'immuabilité. En d'autres termes, il désigne l'Activité sélective et le Devenir. C'est seulement, je crois, en raisonnant de la sorte, et nullement avec les arguments dont ont fait usage à ce propos plusieurs orientalistes, que nous pouvons établir l'existence en Chine, dès le VIe siècle avant notre ère, de la notion théologique trinitaire qui nous représente Dieu tout à la fois créateur de l'univers et en voie de se créer lui-même par l'appoint _indispensable_ de l'universalité de ses créatures. Dans une autre occasion, je me propose de démontrer la valeur tout à fait exceptionnelle de cette idée qui se retrouve dans l'antiquité orientale non seulement chez les Indiens (la _trimourti_), mais encore chez d'autres peuples, notamment chez les Japonais, au sein de leur Sintauisme primitif[44]. Malgré l'admirable puissance de sa théorie philosophique, Lao-tse ne devait obtenir d'écho dans les masses ignorantes que lorsque sa doctrine aurait été matérialisée de fond en comble et abâtardie de façon à devenir intelligible pour la foule inculte et à satisfaire ses instincts grossiers. A ce point de vue, il a eu la destinée de tous les grands instituteurs religieux: rien dans la pratique n'a survécu de son oeuvre qu'une grossière et mercantile contrefaçon de son enseignement. N'hésitons pas à le reconnaître avec tristesse: tel est le sort des penseurs qui espèrent trop de la pauvre humanité ou qui, du moins, devancent avec trop de génie le travail lent et sans cesse interrompu de son émancipation. Du moment où la souffrance a été l'apanage de tout ce qui vit, il était inévitable que l'homme qui souffre ait la velléité de croire à un être de sa propre nature, mais plus puissant que lui, auquel il puisse demander de mettre un terme à ses maux et parfois même de lui accorder des jouissances ici-bas. Quelque soit l'état de son esprit, il ne peut s'abstenir d'invoquer pour son service et ses besoins un ou plusieurs magots fabriqués à son image. De grands progrès intellectuels devront être accomplis avant qu'on puisse retirer aux malheureux la douce illusion de la prière et le droit de pousser le cri qui échappe sans cesse, aussi bien aux savants qu'aux ignorants, aux forts et aux faibles d'esprit: «Ah! mon Dieu.» Au début de cette conférence, j'ai signalé les graves inconvénients qui résultent de l'emploi insuffisamment réfléchi du mot «athée» pour désigner un individu et bien plus encore pour qualifier une race ou une fraction quelconque de l'humanité. Il n'est pas moins fâcheux de soutenir qu'un peuple est supérieur ou inférieur parce qu'on l'a qualifié plus ou moins à la légère de monothéiste, de polythéiste, de panthéiste, de fétichiste ou d'idolâtre. Le monothéisme est parfois la conséquence d'un puissant et splendide travail intellectuel; parfois aussi, il n'est rien de plus que la résultante d'un défaut d'imagination. Le Déisme est, sans aucun doute, une très haute conception de l'homme supérieur, mais alors seulement qu'il répond à la culture d'une idée intuitive dont chaque être a le devoir de provoquer la naissance dans son organisation intime. Si le temps ne m'avait pas manqué pour soutenir devant vous cette manière de voir, je vous aurais entretenu de l'état déplorablement rudimentaire de l'idée déiste chez de nombreuses populations du globe. Je vous aurais parlé notamment des Coréens qui sculptent à plaisir de petits dieux grotesques sur des bûches de bois et qui les entourent de fleurs et de parfums lorsque le hasard leur fait croire qu'ils leur doivent les faveurs dont ils leur ont adressé la demande en prière. En revanche, lorsque par malheur ces petits dieux de bois ne leur sont pas propices, ils se font une fête avec leurs amis de les démolir à coups de pierre. On ne peut cependant pas dire que ces Coréens sont des athées, puisqu'ils rendent un culte à une foule de divinités de leur invention; mais il me répugne de les compter parmi les déistes pour lesquels toutes les créatures honnêtes et intelligentes doivent professer des sentiments de haute estime et d'inépuisable admiration. Il est temps de m'arrêter. Je me crois autorisé, en terminant, à soutenir que la civilisation chinoise ne professe pas plus l'athéisme qu'_aucune_ autre des grandes civilisations du monde, et que le Déisme de la Chine, dès la haute antiquité, a même atteint à une hauteur de conception que notre orgueilleuse Europe ne peut guère prétendre avoir sérieusement dépassée. C'est là ce que je tenais surtout à vous dire dans cette petite improvisation. 1: _Taï-kih_, litt. «le grand terme, le grand extrême». 2: En chinois: _pen tchoung_. 3: En chinois: _tchi hoa tchi tchi ye_; _wouh kih hoeï tchi pien_. 4: En chinois: _Taï-Yih ye_. 5: En chinois: _Taï-kih oeï tien-ti weï-fen i-tsien youen-ki oell weï yih_. (Voy. _Peï-wen-yun-fou_, t. CII, _a_, p. 158.) 6: _Tien ti wan-wouh tchi li._ (Voy. _Peï-wen yun-fou_, loc. cit.) 7: Le système des _Leang-i_ se rencontre dans toutes les manifestations religieuses de l'antiquité asiatique. Je crois qu'il y aurait un grand intérêt à l'étudier dans ses rapports avec l'idée trinitaire que j'ai rencontrée jusque dans les îles de l'Extrême-Orient. 8: D'après le _Taï-kih tou-choueh_. 9: Voy. Kouh-liang, Commentaire du _Tchun-tsieou_ «le Printemps et l'Automne» de Confucius, cité par le _Youen-kien loui-han_, t. XII, p. 24, et la mention de ce passage dans ma traduction de _Ni-hon-Syo-ki_, publiée dans la collection des travaux de l'École des Langues Orientales, t. II, p. XXIX. 10: En chinois: _Taï-kih tien ye_. 11: En chinois: _Tien-ki ye_. 12: En chinois: _Tien tchi teh_. 13: En chinois: _Tien tchi kouan_. 14: Voy. le _Tcheou-li mouh-loh_. 15: En chinois: _Tien-tche chi-seng_. 16: Voy. Ho-kouan-tse, _Tien-kouan_. 17: Voy. _Li-ki_, chap. Kioh-li, part. 1.--L'abbé Callery traduit les mots _koueï-chin_, litt. «les Démons et les Génies», par «les Esprits et les Dieux». Il croit pouvoir, de la sorte, constater l'existence du polythéisme dans le Grand-Rituel de l'École dite des Lettrés, et mentionne, sans en indiquer clairement la différence, deux sortes d'êtres surnaturels qui ont droit au culte des hommes. Ce fameux Rituel nous apprend d'ailleurs comment nous devons chercher à obtenir la solution de nos doutes. Il suffit pour cela «de les soumettre au sort; on ne sera jamais induit en erreur(!)». (Voy. _Mémorial des Rites_, p. 5.)--Je ne crois pas aller trop loin en disant que pour bien saisir l'idée des Chinois sur les _chin_ et les _koueï_, il serait nécessaire de produire les définitions des indigènes les plus autorisés relatives à ces deux classes de personnifications métaphysiques de leur panthéon, travail qui ne me paraît pas encore été accompli d'une façon quelque peu satisfaisante. 18: En chinois: _ti_. 19: Suivant l'antique dictionnaire _oell-ya_. 20: Voy. _Peï-wen yun-fou_, t. LXVII, part. II, p. 7. 21: _Li-ki_ (Grand Rituel), chap. _Ming-ling_. 22: En chinois: _Teh hoh tien tche, ching ti_. 23: En chinois: _Teh peï tien-ti, tsaï tching, pouh tsai sse, youeh ti_. 24: En chinois: _Ti tien-chin ye_. 25: En chinois: _Chou-king_ (Bible de l'antiquité chinoise), chap. _Chun-tien_. 26: En chinois: _Youen-tien_. 27: _Taï-yih_, expression que Wells Williams traduit par «the primordial Cause; the ground or reason of». C'est aussi le nom d'une étoile dans la constellation du Dragon. 28: Terrien de la Couperie. 29: _The Sacred Books of China_, part II, Introduction, p. 51. 30: Legge, dans les _Sacred Books of the East_, de F. Max Muller, t. XVI, pp. 1-2 et pass. de l'Introduction jointe à cet ouvrage. Ajoutons que quelques auteurs chinois ont été jusqu'à prétendre qu'on rencontrait dans le _Yih-king_ des traces manifestes de plusieurs grandes vérités scientifiques découvertes depuis par les savants du monde occidental. (_Oper. supr. cit._, p. 54.) 31: Inutile de dire que ces synchronismes ont fait rêver bien des savants et même des penseurs. Je crois néanmoins qu'on ne saurait montrer trop de réserve à adopter les suppositions de quelques orientalistes au sujet de ce siècle considérable dans les fastes de l'humanité intellectuelle, comme par exemple celle qui résulte des ressemblances de noms signalées par le Dr Leitner, de Woking, entre le bouddhiste _Bouddhagoras_ et le philosophe _Pythagore_; etc., etc. (Voy. _Congrès international des Sciences Ethnographiques_, session de Paris, 1878; compte-rendu, p. 307.) 32: Stanislas Julien, _Le Livre de la Voie et de la Vertu_, composé dans le VIe siècle avant l'ère chrétienne par le philosophe Lao-tseu. Traduit en français, et publié avec le texte chinois et un commentaire perpétuel. Paris, 1842; in-8o. 33: Cette opinion est d'ailleurs celle de quelques-uns des plus célèbres écrivains de la Chine. Le grand historiographe Sse-ma Tsien, par exemple, avait plus d'estime pour _Hoang-tao_ (Lao-tse) que pour les six _King_, communément désignés comme les livres sacrés par excellence de l'Ecole de Confucius. (Voy. le P. Prémare, dans les _Annales de Philosophie Chrétienne_ de Bonnetty, sixième série, t. VIII, p. 19.) 34: G. Pauthier, _Le Livre révéré de la Raison suprême et de la Vertu_, par Lao-tseu, traduit en français et publié pour la première fois en Europe, avec une version latine et le texte chinois en regard, accompagné du commentaire complet de Sie-hoëi, d'origine occidentale, et de notes tirées de divers autres commentateurs chinois. Paris, 1838; in-8o (ouvrage dont la publication n'a pas été terminée). 35: Voy. notamment le Dr James Legge, _The Religions of China_, p. 220; Mayers, _The Speculations of the Old Philosopher Lao-tse_, Introduction, p. XI; G. de Harlez, dans les _Mémoires couronnés par l'Académie Royale de Belgique_, 1884; Balfour, _The Divine Classic of Nan-hua_, Excursus, p. xxxv; Callery, dans les _Memorie della R. Accademia delle Scienze_, de Turin, Sciences morales, série II, t. XV, p. 45; Carlo Puini, _Il Buddha, Confucio e Lao-tse_, p. 473; Fr. Neumann, de Munich, _Das Buch von der Kraft und Wirkung_; Chantepie de la Saussaye, _Lehrbuch der Religionsgeschichte_, t. I, p. 253. 36: Abel-Rémusat, _Mémoire sur la vie et les opinions de Lao-tseu_, philosophe chinois du VIe siècle avant notre ère qui a professé les opinions communément attribuées à Pythagore, à Platon et à leurs disciples. Paris, 1823; in-4o. 37: Notamment le P. Amyot, dans les _Mémoires concernant les Chinois_, t. I. 38: Abel-Rémusat, _Libr. cit._, p. 42; Stanislas Julien, _Le Livre de la Voie et de la Vertu_, introduction, p. V. 39: Voy. dans mon _Taoïsme_, chap. V, la définition du Tao et mon article sur la Philosophie du Tao-teh-king, dans les _Mémoires de la Société Sinico-Japonaise_, 1887, t. VI, p. 5. 40: Voy. les motifs allégués par Julien pour traduire le mot _tao_ par «voie», dans son _Livre de la Voie et de la Vertu_, introduction, p. XIII. 41: Voy. Pauthier, _Le Tao-te-king_, p. 5. 42: Notamment M. Victor von Straus, _Lao-tse's Tao-te-king_, 1870. 43: _Lao-tzes Tao-teh-king_, trad. Carus, Introd., p. 13. 44: J'ai réuni les éléments d'un mémoire étendu sur la question de la _Teh_ dans le taoïsme: je diffère cependant sa publication, parce qu'il me reste à lire et à étudier plusieurs ouvrages chinois, notamment l'oeuvre de Sou Tse-yeou, auxquels j'attache la plus sérieuse importance.--Quant à la Trinité du Sintauisme primitif, j'en ai découvert l'existence en préparant ma traduction du _Ni-hon Syo-ki_ (la Bible de l'antiquité japonaise, accompagnée d'un commentaire que j'ai cru devoir rédiger en langue chinoise, ouvrage dont le second volume est sous presse). J'espère avoir le temps d'en exposer un jour le caractère et la haute portée philosophique qui font le plus grand honneur à la civilisation originelle des insulaires de l'Extrême-Orient. *** END OF THE PROJECT GUTENBERG EBOOK L'IDÉE DE DIEU DANS LA PHILOSOPHIE RELIGIEUSE DE LA CHINE *** Updated editions will replace the previous one—the old editions will be renamed. Creating the works from print editions not protected by U.S. copyright law means that no one owns a United States copyright in these works, so the Foundation (and you!) can copy and distribute it in the United States without permission and without paying copyright royalties. Special rules, set forth in the General Terms of Use part of this license, apply to copying and distributing Project Gutenberg™ electronic works to protect the PROJECT GUTENBERG™ concept and trademark. Project Gutenberg is a registered trademark, and may not be used if you charge for an eBook, except by following the terms of the trademark license, including paying royalties for use of the Project Gutenberg trademark. If you do not charge anything for copies of this eBook, complying with the trademark license is very easy. You may use this eBook for nearly any purpose such as creation of derivative works, reports, performances and research. Project Gutenberg eBooks may be modified and printed and given away—you may do practically ANYTHING in the United States with eBooks not protected by U.S. copyright law. Redistribution is subject to the trademark license, especially commercial redistribution. START: FULL LICENSE THE FULL PROJECT GUTENBERG LICENSE PLEASE READ THIS BEFORE YOU DISTRIBUTE OR USE THIS WORK To protect the Project Gutenberg™ mission of promoting the free distribution of electronic works, by using or distributing this work (or any other work associated in any way with the phrase “Project Gutenberg”), you agree to comply with all the terms of the Full Project Gutenberg™ License available with this file or online at www.gutenberg.org/license. Section 1. General Terms of Use and Redistributing Project Gutenberg™ electronic works 1.A. By reading or using any part of this Project Gutenberg™ electronic work, you indicate that you have read, understand, agree to and accept all the terms of this license and intellectual property (trademark/copyright) agreement. If you do not agree to abide by all the terms of this agreement, you must cease using and return or destroy all copies of Project Gutenberg™ electronic works in your possession. If you paid a fee for obtaining a copy of or access to a Project Gutenberg™ electronic work and you do not agree to be bound by the terms of this agreement, you may obtain a refund from the person or entity to whom you paid the fee as set forth in paragraph 1.E.8. 1.B. “Project Gutenberg” is a registered trademark. It may only be used on or associated in any way with an electronic work by people who agree to be bound by the terms of this agreement. There are a few things that you can do with most Project Gutenberg™ electronic works even without complying with the full terms of this agreement. See paragraph 1.C below. There are a lot of things you can do with Project Gutenberg™ electronic works if you follow the terms of this agreement and help preserve free future access to Project Gutenberg™ electronic works. See paragraph 1.E below. 1.C. The Project Gutenberg Literary Archive Foundation (“the Foundation” or PGLAF), owns a compilation copyright in the collection of Project Gutenberg™ electronic works. Nearly all the individual works in the collection are in the public domain in the United States. If an individual work is unprotected by copyright law in the United States and you are located in the United States, we do not claim a right to prevent you from copying, distributing, performing, displaying or creating derivative works based on the work as long as all references to Project Gutenberg are removed. Of course, we hope that you will support the Project Gutenberg™ mission of promoting free access to electronic works by freely sharing Project Gutenberg™ works in compliance with the terms of this agreement for keeping the Project Gutenberg™ name associated with the work. You can easily comply with the terms of this agreement by keeping this work in the same format with its attached full Project Gutenberg™ License when you share it without charge with others. 1.D. The copyright laws of the place where you are located also govern what you can do with this work. Copyright laws in most countries are in a constant state of change. If you are outside the United States, check the laws of your country in addition to the terms of this agreement before downloading, copying, displaying, performing, distributing or creating derivative works based on this work or any other Project Gutenberg™ work. The Foundation makes no representations concerning the copyright status of any work in any country other than the United States. 1.E. Unless you have removed all references to Project Gutenberg: 1.E.1. The following sentence, with active links to, or other immediate access to, the full Project Gutenberg™ License must appear prominently whenever any copy of a Project Gutenberg™ work (any work on which the phrase “Project Gutenberg” appears, or with which the phrase “Project Gutenberg” is associated) is accessed, displayed, performed, viewed, copied or distributed: This eBook is for the use of anyone anywhere in the United States and most other parts of the world at no cost and with almost no restrictions whatsoever. You may copy it, give it away or re-use it under the terms of the Project Gutenberg License included with this eBook or online at www.gutenberg.org. If you are not located in the United States, you will have to check the laws of the country where you are located before using this eBook. 1.E.2. If an individual Project Gutenberg™ electronic work is derived from texts not protected by U.S. copyright law (does not contain a notice indicating that it is posted with permission of the copyright holder), the work can be copied and distributed to anyone in the United States without paying any fees or charges. If you are redistributing or providing access to a work with the phrase “Project Gutenberg” associated with or appearing on the work, you must comply either with the requirements of paragraphs 1.E.1 through 1.E.7 or obtain permission for the use of the work and the Project Gutenberg™ trademark as set forth in paragraphs 1.E.8 or 1.E.9. 1.E.3. If an individual Project Gutenberg™ electronic work is posted with the permission of the copyright holder, your use and distribution must comply with both paragraphs 1.E.1 through 1.E.7 and any additional terms imposed by the copyright holder. Additional terms will be linked to the Project Gutenberg™ License for all works posted with the permission of the copyright holder found at the beginning of this work. 1.E.4. Do not unlink or detach or remove the full Project Gutenberg™ License terms from this work, or any files containing a part of this work or any other work associated with Project Gutenberg™. 1.E.5. Do not copy, display, perform, distribute or redistribute this electronic work, or any part of this electronic work, without prominently displaying the sentence set forth in paragraph 1.E.1 with active links or immediate access to the full terms of the Project Gutenberg™ License. 1.E.6. You may convert to and distribute this work in any binary, compressed, marked up, nonproprietary or proprietary form, including any word processing or hypertext form. However, if you provide access to or distribute copies of a Project Gutenberg™ work in a format other than “Plain Vanilla ASCII” or other format used in the official version posted on the official Project Gutenberg™ website (www.gutenberg.org), you must, at no additional cost, fee or expense to the user, provide a copy, a means of exporting a copy, or a means of obtaining a copy upon request, of the work in its original “Plain Vanilla ASCII” or other form. Any alternate format must include the full Project Gutenberg™ License as specified in paragraph 1.E.1. 1.E.7. Do not charge a fee for access to, viewing, displaying, performing, copying or distributing any Project Gutenberg™ works unless you comply with paragraph 1.E.8 or 1.E.9. 1.E.8. You may charge a reasonable fee for copies of or providing access to or distributing Project Gutenberg™ electronic works provided that: • You pay a royalty fee of 20% of the gross profits you derive from the use of Project Gutenberg™ works calculated using the method you already use to calculate your applicable taxes. The fee is owed to the owner of the Project Gutenberg™ trademark, but he has agreed to donate royalties under this paragraph to the Project Gutenberg Literary Archive Foundation. Royalty payments must be paid within 60 days following each date on which you prepare (or are legally required to prepare) your periodic tax returns. Royalty payments should be clearly marked as such and sent to the Project Gutenberg Literary Archive Foundation at the address specified in Section 4, “Information about donations to the Project Gutenberg Literary Archive Foundation.” • You provide a full refund of any money paid by a user who notifies you in writing (or by e-mail) within 30 days of receipt that s/he does not agree to the terms of the full Project Gutenberg™ License. You must require such a user to return or destroy all copies of the works possessed in a physical medium and discontinue all use of and all access to other copies of Project Gutenberg™ works. • You provide, in accordance with paragraph 1.F.3, a full refund of any money paid for a work or a replacement copy, if a defect in the electronic work is discovered and reported to you within 90 days of receipt of the work. • You comply with all other terms of this agreement for free distribution of Project Gutenberg™ works. 1.E.9. If you wish to charge a fee or distribute a Project Gutenberg™ electronic work or group of works on different terms than are set forth in this agreement, you must obtain permission in writing from the Project Gutenberg Literary Archive Foundation, the manager of the Project Gutenberg™ trademark. Contact the Foundation as set forth in Section 3 below. 1.F. 1.F.1. Project Gutenberg volunteers and employees expend considerable effort to identify, do copyright research on, transcribe and proofread works not protected by U.S. copyright law in creating the Project Gutenberg™ collection. Despite these efforts, Project Gutenberg™ electronic works, and the medium on which they may be stored, may contain “Defects,” such as, but not limited to, incomplete, inaccurate or corrupt data, transcription errors, a copyright or other intellectual property infringement, a defective or damaged disk or other medium, a computer virus, or computer codes that damage or cannot be read by your equipment. 1.F.2. LIMITED WARRANTY, DISCLAIMER OF DAMAGES - Except for the “Right of Replacement or Refund” described in paragraph 1.F.3, the Project Gutenberg Literary Archive Foundation, the owner of the Project Gutenberg™ trademark, and any other party distributing a Project Gutenberg™ electronic work under this agreement, disclaim all liability to you for damages, costs and expenses, including legal fees. YOU AGREE THAT YOU HAVE NO REMEDIES FOR NEGLIGENCE, STRICT LIABILITY, BREACH OF WARRANTY OR BREACH OF CONTRACT EXCEPT THOSE PROVIDED IN PARAGRAPH 1.F.3. YOU AGREE THAT THE FOUNDATION, THE TRADEMARK OWNER, AND ANY DISTRIBUTOR UNDER THIS AGREEMENT WILL NOT BE LIABLE TO YOU FOR ACTUAL, DIRECT, INDIRECT, CONSEQUENTIAL, PUNITIVE OR INCIDENTAL DAMAGES EVEN IF YOU GIVE NOTICE OF THE POSSIBILITY OF SUCH DAMAGE. 1.F.3. LIMITED RIGHT OF REPLACEMENT OR REFUND - If you discover a defect in this electronic work within 90 days of receiving it, you can receive a refund of the money (if any) you paid for it by sending a written explanation to the person you received the work from. If you received the work on a physical medium, you must return the medium with your written explanation. The person or entity that provided you with the defective work may elect to provide a replacement copy in lieu of a refund. If you received the work electronically, the person or entity providing it to you may choose to give you a second opportunity to receive the work electronically in lieu of a refund. If the second copy is also defective, you may demand a refund in writing without further opportunities to fix the problem. 1.F.4. Except for the limited right of replacement or refund set forth in paragraph 1.F.3, this work is provided to you ‘AS-IS’, WITH NO OTHER WARRANTIES OF ANY KIND, EXPRESS OR IMPLIED, INCLUDING BUT NOT LIMITED TO WARRANTIES OF MERCHANTABILITY OR FITNESS FOR ANY PURPOSE. 1.F.5. Some states do not allow disclaimers of certain implied warranties or the exclusion or limitation of certain types of damages. If any disclaimer or limitation set forth in this agreement violates the law of the state applicable to this agreement, the agreement shall be interpreted to make the maximum disclaimer or limitation permitted by the applicable state law. The invalidity or unenforceability of any provision of this agreement shall not void the remaining provisions. 1.F.6. INDEMNITY - You agree to indemnify and hold the Foundation, the trademark owner, any agent or employee of the Foundation, anyone providing copies of Project Gutenberg™ electronic works in accordance with this agreement, and any volunteers associated with the production, promotion and distribution of Project Gutenberg™ electronic works, harmless from all liability, costs and expenses, including legal fees, that arise directly or indirectly from any of the following which you do or cause to occur: (a) distribution of this or any Project Gutenberg™ work, (b) alteration, modification, or additions or deletions to any Project Gutenberg™ work, and (c) any Defect you cause. Section 2. Information about the Mission of Project Gutenberg™ Project Gutenberg™ is synonymous with the free distribution of electronic works in formats readable by the widest variety of computers including obsolete, old, middle-aged and new computers. It exists because of the efforts of hundreds of volunteers and donations from people in all walks of life. Volunteers and financial support to provide volunteers with the assistance they need are critical to reaching Project Gutenberg™’s goals and ensuring that the Project Gutenberg™ collection will remain freely available for generations to come. In 2001, the Project Gutenberg Literary Archive Foundation was created to provide a secure and permanent future for Project Gutenberg™ and future generations. To learn more about the Project Gutenberg Literary Archive Foundation and how your efforts and donations can help, see Sections 3 and 4 and the Foundation information page at www.gutenberg.org. Section 3. Information about the Project Gutenberg Literary Archive Foundation The Project Gutenberg Literary Archive Foundation is a non-profit 501(c)(3) educational corporation organized under the laws of the state of Mississippi and granted tax exempt status by the Internal Revenue Service. The Foundation’s EIN or federal tax identification number is 64-6221541. Contributions to the Project Gutenberg Literary Archive Foundation are tax deductible to the full extent permitted by U.S. federal laws and your state’s laws. The Foundation’s business office is located at 809 North 1500 West, Salt Lake City, UT 84116, (801) 596-1887. Email contact links and up to date contact information can be found at the Foundation’s website and official page at www.gutenberg.org/contact Section 4. Information about Donations to the Project Gutenberg Literary Archive Foundation Project Gutenberg™ depends upon and cannot survive without widespread public support and donations to carry out its mission of increasing the number of public domain and licensed works that can be freely distributed in machine-readable form accessible by the widest array of equipment including outdated equipment. Many small donations ($1 to $5,000) are particularly important to maintaining tax exempt status with the IRS. The Foundation is committed to complying with the laws regulating charities and charitable donations in all 50 states of the United States. Compliance requirements are not uniform and it takes a considerable effort, much paperwork and many fees to meet and keep up with these requirements. We do not solicit donations in locations where we have not received written confirmation of compliance. To SEND DONATIONS or determine the status of compliance for any particular state visit www.gutenberg.org/donate. While we cannot and do not solicit contributions from states where we have not met the solicitation requirements, we know of no prohibition against accepting unsolicited donations from donors in such states who approach us with offers to donate. International donations are gratefully accepted, but we cannot make any statements concerning tax treatment of donations received from outside the United States. U.S. laws alone swamp our small staff. Please check the Project Gutenberg web pages for current donation methods and addresses. Donations are accepted in a number of other ways including checks, online payments and credit card donations. To donate, please visit: www.gutenberg.org/donate. Section 5. General Information About Project Gutenberg™ electronic works Professor Michael S. Hart was the originator of the Project Gutenberg™ concept of a library of electronic works that could be freely shared with anyone. For forty years, he produced and distributed Project Gutenberg™ eBooks with only a loose network of volunteer support. Project Gutenberg™ eBooks are often created from several printed editions, all of which are confirmed as not protected by copyright in the U.S. unless a copyright notice is included. Thus, we do not necessarily keep eBooks in compliance with any particular paper edition. Most people start at our website which has the main PG search facility: www.gutenberg.org. This website includes information about Project Gutenberg™, including how to make donations to the Project Gutenberg Literary Archive Foundation, how to help produce our new eBooks, and how to subscribe to our email newsletter to hear about new eBooks.